Travailler à son domicile : témoignages

Transcription

Travailler à son domicile : témoignages
Assistants maternels : concilier vie privée et vie professionnelle,
est-ce toujours une évidence ?
Témoignages
(Les noms et prénoms n’apparaissent pas afin de préserver l’anonymat des personnes)
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Présentation : depuis combien de temps exercez-vous la profession, comment êtes-vous
arrivée à ce métier dans votre parcours professionnel ?
Pour vous, est-il facile de séparer vie privée et vie professionnelle quand on est assistante
maternelle ?
Comment faites-vous au quotidien pour poser des limites ? Avez-vous des outils (charte
d’accueil, projet d’accueil, règles de vie, etc.) ?
Selon vous, cette caractéristique de la profession est-elle facile à gérer au quotidien ?
Observations particulières
S.
J'ai commencé à travailler à 18 ans comme secrétaire-comptable, je me suis mariée à 21 ans, en
épousant un agriculteur je suis devenue agricultrice pendant 15 ans. Nous avons eu 2 enfants en
1985 et en 1988. En 1999, nous avons décidé d’arrêter l’élevage de porcs. Mes enfants m'ont dit : "S i
tu pars travailler ailleurs on ne te verra plus" Après réflexion et avec l'accord de toute la famille, j’ai
demandé un agrément au Conseil Général pour devenir Assistante Maternelle Agréée, et ainsi
pouvoir concilier vie de famille et vie professionnelle. S’en est suivi la formation complète puis le
début des accueils.
Je conçois bien mon métier et ma vie privée. Lorsque je rencontre les familles pour la première fois,
je leur explique les règles de vie de la maison et ma façon de travailler. Mon mari est parfois présent
en même temps que les enfants, les parents le savent et acceptent cette particularité quand ils
s’engagent dans l’accueil. S’ils sont en désaccord, il est préférable de ne pas travailler ensemble.
Au quotidien, il faut souvent rappeler les règles, ou les repréciser en fonction des interrogations de
chacun. Les enfants ont des rituels très rapidement avec moi et quelquefois, testent les limites. Je
joue à l'intérieur et à l’extérieur, le jeu libre est important dans ma pratique, les jeux sont installés
dans le salon.
Les parents sont généralement assez respectueux des horaires, je suis assez souple mais il n’y a pas
d’abus. Nous nous organisons en fonction des possibilités de chacun, c’est donnant-donnant et cela
fonctionne bien. Puis, dans l’année, j’organise des temps de rencontre avec les parents, à la maison,
pour qu’ils puissent se rencontrer. Cela peut être une soirée galette des rois ou au moment de Noël.
La convivialité entre les familles me parait très importante ainsi que la communication.
A la fin de ma journée, j’aime aussi retrouver ma maison. Lorsque le dernier enfant est parti, je range
tous les jeux, et fait place nette, cela me permet de marquer une coupure entre mon métier et de
retrouver ma maison.
La malle aux infos – Numéro 12 – Avril 2015
J’aime mon travail et je suis heureuse d'être à la maison. Ce n’est donc pas une contrainte pour moi
de concilier les deux, cela est assez naturel. Je continuerai tant que les parents me feront confiance
et que les enfants prendront plaisir à être avec moi.
N.
Quand il a fallu choisir une orientation pour les études après la classe de troisième, je voulais
poursuivre dans le domaine de l’enfance (sage-femme, puéricultrice, éducatrice pour enfants
handicapés) mais à l'époque, on parlait plus de l'informatique ou du secrétariat, orientation que j’ai
suivi. C'est un domaine dans lequel j'ai travaillé une quinzaine d'années mais avec toujours l'idée de
retourner vers les enfants un jour. Le métier d'assistante maternelle m'a intéressée car je n'avais pas
besoin de reprendre des études mais aussi car c'est un métier qui me laissait libre de m'organiser
comme je voulais. Par contre, pour pouvoir être à temps plein avec les enfants que j'allais accueillir,
je souhaitais attendre que mes enfants soient grands et autonomes. Maintenant, cela fait 7 ans que
je suis assistante maternelle et j'espère exercer ce métier le plus longtemps possible. Mon mari m'a
rejoint depuis 2 ans suite à un accident du travail, on se complète.
Je trouve compliqué de séparer vie professionnelle et vie privée. Déjà, pour pouvoir travailler à la
maison, il faut que toute la famille soit d'accord ; pour notre métier, on utilise très souvent toutes les
pièces de la maison dont les chambres de nos enfants. En fait, nous ne sommes plus chez nous dès
que le premier enfant arrive jusqu'à ce que le dernier reparte le soir (7 h 30 – 18 h 45). Les enfants
utilisent tout le rez-de-chaussée pour jouer, manger et les chambres pour la sieste.
Le soir, c’est le rangement qui permet de faire une coupure, même si, nous vivons tout de même
dans une maison remplie de jeux et de matériel de puériculture. Par contre, pendant les vacances, je
démonte tout le matériel (lits, tapis, jeux, etc.) qui est rangé dans un endroit de la maison pour
pouvoir récupérer l’ensemble des espaces.
Mais, ce n’est pas un aspect gênant de notre métier, nous le savions dès le départ.
Nous n’avons pas vraiment besoin de poser des limites aux parents, c’est assez naturel, personne
n’abuse des horaires, personne n’est intrusif dans notre vie privée.
Il a fallu également poser un cadre auprès de notre entourage, et faire bien comprendre que même
si nous sommes à la maison, il s’agit d’un lieu de travail.
Je ne regrette en rien mon orientation. C'est un métier épanouissant et passionnant. On voit les
enfants grandir, s'épanouir, se développer. D’ailleurs, ils reviennent toujours nous voir plusieurs
années après être partis, nous pouvons donc penser qu'ils se sont plus à la maison et que notre façon
de fonctionner ne doit pas être si mauvaise que ça … nous sommes aussi conscients qu'il y a toujours
des améliorations à apporter, et qu'il faut toujours se remettre en question.
La malle aux infos – Numéro 12 – Avril 2015
G.
J’ai tout d’abord exercé en tant qu’agricultrice, puis porchère, avant de donner naissance à notre
troisième enfant. A ce moment, les conditions de travail de mon mari et notre situation familiale
m’ont amenée à changer de voie professionnelle. C’est ainsi qu’en 2006, j’ai fait le choix de devenir
assistante maternelle. Ce métier me permettait de concilier ma vie de famille et de m’occuper
d’autres enfants.
Au début de ma carrière, cela n’a pas toujours été facile. Mes deux premiers enfants, âgés de 9 et 8
ans, ne comprenaient pas toujours pourquoi je m’occupais d’autres enfants, et pourquoi je ne
pouvais pas toujours m’occuper d’eux. Il a donc fallu que je prenne le temps de leur expliquer que
même si j’étais à la maison, c’était mon travail de m’occuper des autres enfants. Avec le temps, ils
ont compris et ont trouvé leur place dans cette organisation.
Il y avait aussi l’utilisation des chambres de mes enfants, occupées par les petits pendant la sieste. Là
encore, nous avons cherché des astuces, des jeux, pour les distraire lorsque ces pièces étaient
occupées.
La séparation entre vie privée et vie professionnelle a vraiment pu avoir lieu lorsque nous avons,
avec mon mari, aménagé une partie du garage pour créer une cuisine et une pièce dédiée à mon
travail. Dans cette pièce, j’ai pu installer les jeux des enfants, une table à langer, tout ce dont j’avais
besoin pour travailler. Cette pièce dispose d’une entrée indépendante, ce qui permet aux familles
d’être directement accueillies dans cet espace, et donc préserver mon environnement personnel. Les
enfants que j’accueille ne vont dans la maison qu’au moment de la sieste. Ainsi, chacun s’y retrouve.
Lorsque mes enfants rentraient de l’école, ils pouvaient aussi profiter de la maison.
Cette pièce m’a permis de délimiter le cadre de mon travail, à la fois pour moi (lieu dédié, moins de
tentation aux tâches domestiques, etc.), pour mes enfants et les familles accueillies. Cela m’a
conforté dans mon choix professionnel, me permet d’être plus à l’aise dans mon travail et de pouvoir
faire une séparation avec ma vie privée. D’ailleurs, les familles que j’ai accueillies jusqu’à présent ont
toujours été correctes et respectueuses des règles de vie.
Le contact avec les autres collègues, avec le relais, me permet des échanges sur la façon d’exercer le
métier, de se sentir moins isolée même si j’apprécie l’indépendance et les particularités de travail
liées à cette profession.
La malle aux infos – Numéro 12 – Avril 2015