La lettre du P.E.N. Club français MARE NOSTRUM

Transcription

La lettre du P.E.N. Club français MARE NOSTRUM
Nouvelle série
n° 13
Décembre 2007
La lettre du P.E.N. Club français
P.E.N. Club français : Poètes, Essayistes, Nouvellistes • L’un des centres du P.E.N. Club International, organisation
mondiale d’écrivains • 6, rue François-Miron, 75004 Paris – Téléphone : 01 42 72 41 83
Courriel : [email protected] www.penclub.fr - Rédaction de la Lettre : Françoise Goupil, Philippe Pujas
MARE NOSTRUM
Mondialisation, diversité : entre ces deux versants de
la réalité du monde contemporain, entre ces deux mots
déjà menacés d’usure à force de trop servir et de servir
n’importe quoi, comment inscrire l’action des PEN
Clubs, et singulièrement celle du PEN Club français ?
Impossible de ne pas se sentir investi d’une double
responsabilité.
La première est de porter témoignage, comme le PEN
l’a fait pendant toute son histoire, de sa croyance dans
les valeurs de l’humanisme, donc d’une vocation universelle. Le témoignage se porte par la littérature,
c’est-à-dire les écrits de chacun ; il se porte aussi par
une attitude générale et des actions de solidarité envers
ceux qui, dans le monde, sont victimes des valeurs
opposées qui conduisent à la division, à la guerre ou à
l’oppression.
La deuxième responsabilité du PEN Club est d’inscrire les valeurs de la diversité dans ce grand idéal d’humanisme. La diversité est un concept dépassé par son
succès. Ramenons-le simplement à l’idée que l’uniformité est nuisible, et que les différences nourrissent
tous les hommes. La diversité ne sert à rien, elle est
même mauvaise si elle est barrière, elle offre ses vertus si elle offre sa palette à tous. Ainsi en est-il par
exemple des langues, capital commun. Voilà pourquoi
nous nous battons, avec énergie, contre le monopole
actuel d’une langue internationale qui n’a même plus
les vertus et les nuances de sa langue d’origine, qui
peut elle-même s’y perdre. Voilà pourquoi nous som-
mes aussi attentifs à la domination actuelle d’un
modèle économique qui confond culture et divertissement, culture et gros tirages.
Comment pouvons-nous au mieux mener à notre
niveau cet impératif d’une diversité humaniste ? En
s’appuyant sur les solidarités de voisinage qui se dessinent, en portant un projet uni par une grande mer
commune, la Méditerranée.
Cette mer de toutes les tempêtes est aussi le creuset
de civilisations qui n’ont cessé de se rencontrer dans
la guerre et dans la paix, mais qui sont en définitive
assez proches et variées pour que, de part et d’autre,
entre écrivains, nous faisions par l’exemple la
démonstration de notre unité dans la diversité. Notre
ambition, notre projet sont donc de resserrer les liens
entre PEN clubs de la rive sud de la Méditerranée et
de l’Europe. Cette union méditerranéenne élargie à
une partie de l’Afrique sub-saharienne pourrait prendre la forme de projets communs, de rencontres annuelles dans l’un des pays de la région.
Les outils sont en place. Nos contacts amicaux avec
les uns et les autres, la volonté commune de partager
ce projet, l’appui possible des comités spécialisés du
PEN International, Comité de la Paix que préside
notre ami slovène Edouard Kovac, Comité des droits
lingusitiques si attaché à la diversité. C’est pour nous
non pas une nouvelle frontière, mais un bel horizon…
Philippe PUJAS
2
LE CONGRÈS DU PEN INTERNATIONAL
A DAKAR : LE FOSSÉ
Le Congrès 2007 du PEN International s’est tenu du 3 au
11 juillet à Dakar, à l’invitation de nos amis du PEN sénégalais, qui auraient aimé en faire une grande fête de
l’Afrique et de la littérature francophone. Ils y ont parfaitement réussi pour ce qui est de leur part : très belles tables
rondes, soirées poétique et théâtrale … Ils n’ont pas réussi
à inverser la tendance mondiale actuelle à la domination
par un mode de pensée, plus encore qu’une langue, qui
imprègne les instances dirigeantes et l’administration du
PEN International. Un moment révélateur : la soirée poétique organisée par l’administration et consacrée à la poésie africaine a réussi la performance, dans la ville la plus
symbolique de la littérature africaine francophone, de ne
donner la parole qu’à des anglophones…
L’intérêt des congrès reste l’importance des liens qui peuvent se tisser à leur occasion. Celui de Dakar a esquissé un
rapprochement euroméditerranéen et africain (principalement francophone pour l’heure) qui pourrait se concrétiser
à assez brève échéance ( lire l’éditorial ) dans un réseau de
projets communs.
L’assemblée générale qui a conclu le congrès a élu un nouveau Secrétaire international. C’est le Norvégien Eugène
Schoulgin, qui fut notamment au sein du PEN président du
Comité des écrivains en prison, qui succède à l’Américaine
Joane Ackerman, qui ne souhaitait pas poursuivre sa tâche.
La France avait proposé une candidature alternative, celle
de Sylvestre Clancier.
Nous n’avons pas non plus réussi à convaincre le Congrès
que le Congrès de 2008 devrait, comme cela avait été décidé l’an dernier à Berlin, se tenir à Oaxaca, au Mexique. La
ville ayant été entre temps le siège de manifestations sévèrement réprimées, la majorité du Bureau du PEN a
convaincu l’assemblée générale qu’il fallait tenir le
congrès ailleurs. A une courte majorité relative, l’assemblée a choisi Bogota, la capitale de la Colombie, plutôt
qu’un autre site mexicain ou la candidature de dernière
minute de Madrid, que nous avions soutenue après l’abandon d’Oaxaca par l’assemblée générale.
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LA LITTÉRATURE AFRICAINE FRANCOPHONE
Parmi les conférences données dans le cadre du Congrès du PEN International figurait celle de
Lilyan Kestellot, universitaire, chercheuse, qui a dressé un tableau subjectif, mais argumenté,
de l’état de la littérature écrite en Afrique par les écrivains francophones.
Y a-t-il une opposition entre la littérature produite par les
auteurs africains vivant sur le continent et ceux de la “diaspora”, qui vivent en Europe ou aux États-Unis ? Oui, assure Lilyan Kestellot, qui voit les seconds contaminés par le
“certains thèmes de la mode hexagonale”. Ainsi sont
condamnés sans appel les Alain Mabanckou, Calixte Beyala
ou Kossi Effoui…
A ceux-ci, qui auraient perdu dans les voix des sirènes du
large le contact avec la vraie nature et les problèmes du
continent noir, Lilyan Kestellot oppose ceux qui, sur place,
disent les problèmes de leur société. Ils seraient les plus
authentiques représentants de la quatrième génération d’écrivains africains, la première ayant été celle de la “négritude” autour de Senghor et de Présence africaine.
Les noms des générations suivantes sonnent bien comme
ceux d’un développement et d’un enrichissement d’une littérature vigoureuse qui accompagne les difficultés de la
situation politique et sociale du continent : la deuxième est
celle de Mongo Beti, de Cheikh Hamidou Kane et
d’Ahmadou Kourouma, la troisième celle de Félix Tchikaya
et d’Henri Lopes. La quatrième, donc, trouverait sa véritable expression sur le sol africain, à l’abri des humeurs frivoles. Elle est nombreuse et prometteuse, apportant à la littérature francophone une tonalité bienfaisante, dans le
roman comme dans la poésie.
On pourra lire pages 4 et 5 un poème de l’un des auteurs
majeurs de la poésie sénégalaise d’aujourd’hui, notre ami
Amadou Lamine Sall.
TRADUCTION ET DROITS LINGUISTIQUES :
POUR LES LANGUES MINORITAIRES
Le Comité pour la traduction et les droits linguistiques est
présidée par la Macédonienne Kata Kulavkova, et a son
siège dans la capitale macédonienne, Skopje. Grâce à la
forte implication du PEN macédonien, et au soutien des
autorités locales, le Comité peut se réunir tous les ans, en
septembre, à Ohrid, au bord du lac qui sépare la Macédoine
de l’Albanie, et faire avancer ses dossiers entre deux
congrès.
La réunion de cette année a permis de mesurer le travail
accompli par le comité, travail tout-à-fait concret dans deux
directions : une veille sur la situation des langues dans le
monde, une promotion active de la diversité linguistique.
2007 est une année de nouveaux chantiers, après les deux
rapports remarquables qu’a produits le Comité : l’un sur la
traduction (qui se révèle très marginale) aux États-Unis,
l’autre sur les droits linguistiques des minorités, présenté
l’an dernier et qui a fait l’objet cette année d’une édition.
Un tour du monde y est fait, qui englobe la France, sévère-
ment traitée par le Basque Paul Bilbao Sarria.
Le Comité se fixe pour objectif d’ aider à dresser un état du
monde des langues en difficulté, pour lequel il compte travailler avec toutes les institutions concernées, à commencer
par l’UNESCO. Un groupe de travail a été constitué en son
sein, auquel participe le PEN Club français.
Le Comité a initié un programme d’édition électronique de
littérature mondiale, baptisé “Diversité”, qui présente des
auteurs dans leur langue et dans deux autres langues, le
macédonien et l’une des trois langues officielles du PEN,
anglais, espagnol ou français. Parmi les auteurs présentés :
la Québécoise Hélène Dorion, les Portugais Teresa Salema
et Casimiro de Brito, la Croate Sibila Petlevski, le Slovaque
Gustav Murin, le Macédonien Mateja Matevski.
www.diversity.org.mk
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LES VEINES SAUVAGES
chemins de miel que j’aime
Je t’aime comme une guérison
j’aime ta gorge apaisante
la saison de ta bouche quand tu ris
j’aime la maison de tes yeux
tu réchauffes mieux que le ventre
de l’ours à midi
Tu es si belle que tu désamorces
la course des météores…
Tu es mon nouveau livre Boléro
les premières hiéroglyphes d’un nouveau millénaire
Pourquoi veux-tu briser
l’élan des montagnes ?
Pourquoi veux-tu faire taire l’oiseau du désir ?
Depuis bien longtemps
et pour longtemps encore
parce que tu es là
il ne fait plus nuit dans mon cœur
rien que mon regard que ton cœur nourrit
vide les hôpitaux soulage les fous habille les gueux
fait chanter les muets
et j’ai fini par réinventer toutes les leurs
et tu as fini par être plus vraie que le conte
et les champs de pierre vois-tu
ont même poussé en des champs de saphirs
et les troncs de termitière
ont dressé des odeurs de cannelle
tu ne vieilliras pas
jamais tu ne vieilliras en moi
jamais je ne vieillirai en toi
nous aurons la même route
et elle sera la route de la terre
elle sera le chemin visible aux questions de l’homme
elle sera la réponse à la tristesse des enfants
il n’y aura plus de secret pour aimer
pour chanter pour danser
parce que l’amour nous habite
parce que les mots nous ont livré leur âge
parce que la parole a aboli tous les silences
et la nuit accepte enfin de venir se coucher
et le vent sort de la mer
marche en riant dans les rues
ouvre notre fenêtre défoncée et s’allonge sur nous
nous dormons alors et le vent aussi dort
car nous l’avons pris dans les filets de notre ten-
Et danse ma Tzigane
sous les tambours crevés
de ce pays crevé
au soleil crevé
où tuméfié se relève l’espoir toujours têtu
où s’arc-boutent les reins au martyre
du pilon lourd du labeur à deux sous
où s’aiguisent les prières à la lueur
de l’étoile la bougie longtemps morte
ce pays qui se veut cheminant hors
les routes de la honte
aux fils rebelles à la nuit
et où pourtant les princes acclamés
aux courtisans à l’alphabet épileptique
déterrent jusqu’aux terriers sous les roches
arrachent jusque dans la gueule des rats
et des fourmis ce qui restait pour nourrir
l’enfant
Il y a tant d’enfants qui ne
rient plus dans mon pays…
Et voici que j’ose avoir le temps de
Héler l’amour pour t’aimer toi ma Tzigane
Dans mon pays
même la démarche des femmes est en
alexandrin
Et tu es venue ajouter l’amour à l’amour
la mélodie pleine les mortiers
Tu arrivais du nord
là où le soleil épuise ses
larmes derrière les barreaux du ciel
sur le dos des éclairs je sais là
où tu es descendue chanter
nouant tes cheveux aux épis de mil
et tu m’attends du coté le
plus divin de ton corps
là où les dieux ont fait
pousser la fraise dans la mangue
Tu es de ce pays
où les hirondelles ont bu tous les soleils
et le ciel toujours cambré de sommeil
Le vent lève ton nom… Boléro
et ta bouche et tes lèvres infaillibles
ont l’arome langoureux des
dresse
Et pourtant Boléro et pourtant
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les Princes de ce pays ont tout dévoré
ils ont tout volé et tout mangé
ils ont mangé la racine et
jusqu’aux pierres qui bordaient la racine
et dans leur hâte ont tout mangé cru
jusqu’au dernier alphabet de ce pays
et voici que ce pays n’existe plus que
dans la mémoire et le sourire fêlé des paysans
Je sais et tu sais Boléro
combien ces Princes ont asséché
toutes les saisons de nos espoirs
ils ont tout supplicié
les totems, les soleils,
les cours d’eau, les champs d’arachide
les femmes et les vieillards
et les adolescents sont des montres sans remontoirs
des cartes postales d’un pays sans Coran et sans Bible
« et des soldats d’étranges soldats
fument nos espoirs dans des fémurs d’enfants »
Mais avec toi Boléro toi l’Aimée le sang de ce chant
avec toi et cet amour que tu portes et
que je porte plus terrible encore
nous vaincrons la mauvaise terre
pour que pas un bras ne manque à l’AMOUR
« Locataire du néant
fou d'une liberté sans terre
le monde est infidèle à mes rêves
Et les femmes sont amputées du rêve d'aimer
les hommes du rêve de vieillir
Les oiseaux du cœur ont donc migré la pleine lune
et je flirte avec des cœurs dégarnis
seul parmi la roche effeuillée
la fête des péchés
parmi l'arachide rebelle
parmi le mil rebelle
le coton rebelle
le germe rebelle
Seul avec l'hirondelle offensée
seul parmi l'enfance délaissée
le désir mutilé
parmi l'étoile faussée
l'émeraude brisée
les cauris effrayés
les cercueils cloutés
les fenêtres fermées les portes fermées
Je veille ces pays mon pays
ce pays fou de ses fils
fou de sa liberté
infidèle à ses rêves
Mon pays n'est pas né d'une femme…
et pourtant dans mon pays vois-tu
le soleil est une femme le jour est une femme
Amadou Lamine SALL
la joie est une femme le rêve est une femme
le pardon est une femme le chant est une femme
et je suis né du chant des femmes
Viens
partageons l'étoile tombée cette nuit
derrière le sommeil des Prophètes
J'aime regarder
le Sénégal s'endormir le soir sur tes paupières
et se réveiller le matin dans tes yeux
Tu seras l'Unique Miracle des goélands
la GRANDE TERRE
celle pour qui je veux encore
vivre et accepter d’aimer
Amadou Lamine SALL
Poète
Président de la maison africaine
de la poésie internationale
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NOS ACTIVITÉS DU TRIMESTRE
■ Le 8 juin, Le P.E.N. Club français ratification par le Parlement du (lire ci-contre)
s’est associé aux Amis de César
Vallejo, aux Amis de Gaston Miron et
à La Nouvelle Pléiade pour une soirée
poétique à la Société des Gens de
Lettres. Des poèmes inédits ont été lus
par
Nicole
Barrière,
Claude
Beausoleil, Sylvestre Clancier, Carlos
Henderson, Bernard Noël et Patricia
Nolan.
■ Le 23 juin, sur la péniche-restaurant Le QUAI, amarrée quai Anatole
France, au pied du Musée d’Orsay, le
P.E.N. Club français et le journal
belge LE JOURNAL DES POETES,
ont organisé, pour la deuxième année
consécutive, un déjeuner amical et
poétique.
■ Le 21 septembre, le PEN Club a
publié un communiqué exprimant son
inquiétude devant la perspective de
"Protocole de Londres", texte qui rend
facultative la traduction en français
des brevets d'invention en usage en
France.En dépit de nombreuses protestations, le texte a été voté
■ Le 27 octobre, Maurice Couquiaud
a présenté dans nos locaux trois femmes écrivains, Nicole Barrière, Marie
Borin et Elvire Maurouard. Débat
animé autour de trois œuvres et trois
personnalités très différentes.
■ Le 15 novembre, en liaison avec
“Les belles étrangères”, manifestation
du Centre national du livre consacrée
cet automne aux lettres libanaises,
nous avons reçu trois écrivaines libanaises, Joumana Hadad, Etel Adnan et
Nohad Salameh. Dans le même temps,
Jean Guiloineau nous a présenté la
revue “Siècle 21, littérature et société”
■ Le jeudi 22 novembre à 18h30 (6,
rue François Miron) présentation par
les éditions Le Grand Incendie et la
revue Pyro (Julia Musté / Jérome
Nicolle) du recueil Respiration des
routes de Lise Lefebvre (Collection [In
Vitro]
■ Le jeudi 29 novembre à 19h00 (6,
rue François Miron) conférence de
Frederic Gaël Theuriau sur Anatole
France, qui fut, rappelons-le, le premier président du P.E.N. Club français
■ Sur le plan international, le PEN
Club français a été présent au Congrès
du PEN International à Dakar en
juillet (lire par ailleurs) et à la réunion
du Comité de la traduction et des langues minoritaires en septembre à
Ohrid (Macédoine)
DÉCEMBRE AU PEN CLUB
■ C’est le mercredi 5 décembre à à l’Institut culturel canadien, 5, rue de
18h00 dans nos locaux de la rue
François Miron que se tient notre
Assemblée générale, suivie d’un dîner
débat avec Elisabeth Badinter, lauréate
du Grand Prix de la Critique littéraire
2007
■ Le mercredi 12 décembre à 18h30
(6, rue François Miron) nous rendrons
un
hommage
conjoint
avec
l’Académie Mallarmé à Seyhmus
Dagtekin, Prix Mallarmé 2007 Juste
un pont sans feu (Le Castor Astral,
2007), qui lira ses derniers poèmes.
■ Le vendredi 14 décembre à 18h00 ,
Constantine, 75007, métro Invalides)
assemblée générale de La Nouvelle
Pléiade (ouverte au public )
■ Le lundi 17 décembre à 18h30 (6,
rue François Miron) Hommage à Louis
Guillaume, qui aurait eu 100 ans cette
année. Lectures de ses poèmes par
Max Alhau, Jeanine Baude, Lazarine
Bergeret, la famille Clancier, Paul
Farellier, Jeanine Salesse et quelques
autres amis…
■ Le mardi 18 décembre à 18h30 (à
l’Auditorium de La Maison de
l’Amérique latine, 277, Bld Saint-
Germain, présentation et lecture par
Max Alhau et Jean-Pierre Rousseau de
la poésie de poètes du Brésil (Murilo
Mendes, Cecilia Meireles, Mario
Quintana, Vinitius de Moraes,
Francisco Carvalho), de l’Equateur
(Mario Campana), et du Pérou
(Porfirio Mamani Macedo).
Des Brésiliens, Jean-Pierre Rousseau
dit que “Ce sont tous de grandes figures du courant " moderniste ", qui a
profondément marqué la poésie brésilienne du XXe siècle, à part Francisco
Carvalho, plus contemporain, encore
moins connu, mais qui se situe dans cet
héritage. Une poésie, poursuit-il, toute
de sensibilité, facilement accessible.”
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DES POÈTES LIBANAISES AU PEN CLUB
Les Belles étrangères rendaient hommage, cet automne, aux lettres libanaises. Le PEN Club s’est associé à cet hommage
Dans le cadre d’un partenariat CNL
/ PEN Club, à l’occasion des Belles
étrangères Liban et de la parution
du numéro 11 (Automne -Hiver
2007) de la revue « Siècle 21, littérature & société » consacré aux
« Ecrivains libanais d’aujourd’hui » Jean Guiloineau et
Marilyn Hacker ont présenté
au PEN club, en compagnie de
Antoine Jockey, traducteur et
journaliste libanais, les poètes
Etel Adnan, Joumana Haddad
et Nohad Salameh.
L’excellent dossier de la revue
Siècle 21 a été coordonné par
Marilyn Hacker avec l’aide de Vénus
Khoury-Ghata et d’Antoine Jockey.
On y trouve des écrivains – poètes et
romanciers – d’expression arabe, d’expression française, et quelques anglophones, dont une, Etel Adnan, reçue au
PEN Club, est quand même connue
pour un roman écrit en français sur la
guerre civile libanaise, Sitt MarieRose, publié aux éditions Des Femmes
et traduit en plusieurs langues. Elle a
écrit également pour le théâtre et est
artiste-peintre. Née à Beyrouth d’un
père syrien et d’une mère grecque, elle
a eu au Liban une formation française.
Elle a ensuite fait des études supérieures en France et aux Etats-Unis.
Depuis longtemps elle partage sa vie
entre Paris et la Californie. Elle est
l’auteur de nombreux récits en français, L’Apocalypse arabe, Jenine et en
anglais, Paris When it’s Naked, Of
Cities and Women, In the Heart of the
Heart of another country.
Joumana Haddad, elle, est poète,
romancière, journaliste et traductrice.
Elle dirige les pages culturelle du jour-
nal An-Nahar à Beyrouth. Elle maîtrise sept langues et sa propre poésie a été
traduite en espagnol, en anglais, aussi
bien qu’en français. Elle est une des
plus jeunes parmi les femmes poètes
libanises de langue arabe connues. Par
son souffle et par ses résonances, sa
poésie se rattache à la tradition poétique modernisante initiée par le groupe Ch’ir (poésie). Elle est surtout
reconnue pour son expression de l’érotisme féminin qui imprègne son œuvre.
Son livre, Le Retour de Lilith, un
poème magnifique, vient d’être publié
dans une traduction d’Antoine Jockey
aux éditions L’Inventaire que dirige
Brigitte Ouvry-Vial, membre du PEN
Club français (elle en fut la secrétaire
générale adjointe pendant quelques
années).
Le talent de Nohad Salameh qui était,
elle aussi, une de nos invitées de
marque, s’exerce dans divers domaines. Elle multiplie les modes d’appréhension du réel tout autant que les
modes d’expression : la poésie, le
roman, la chronique, la critique littéraire. Lauréate du Prix Louise Labé
en 1988 pour L’Autre écriture, elle a
publié cette année deux très beaux
recueils qui viennent de lui valoir le
Grand Prix d’automne de poésie
Louis Montalte de la Société des
Gens de Lettres, il s’agit de La
Revenante, chez Voix d’encre et de
Baalbeck : les demeures sacrificielles, aux éditions du Cygne.
Après la lectures de poèmes par nos
invitées, la voix de Joumana Haddad
étant accompagnée par celle d’une
talentueuse jeune comédienne, Olivia
Nicosia, le débat passionnant qui a
suivi a permis de répondre à différentes questions : comment la littérature
libanaise est-elle marquée par l’histoire contemporaine du pays ? Existe-t-il
une littérature romanesque engagée au
Liban ? Existe-t-il aussi une poésie
engagée ? Est-ce que la littérature
francophone entretient des rapports
différents avec l’actualité et l’histoire
que la littérature arabophone ? Voit-on
des influences d’autres littératures,
d’autres langues, étant donné que le
Liban est un pays polyglotte et diasporique ?
Siècle 21 - 41 rue Bobillot Paris
N° 11 automne-hiver 2007 - 17 8
ILS ONT PUBLIÉ
■ Elvire MAUROUARD vient de
publier aux Editions du Cygne
Jusqu’au bout du vertige. L’auteur a
publié de nombreux ouvrages qui ont
obtenu chacun un prix et ont été traduits en six langues dont le bulgare et
l’italien. Elvire Maurouard est
Sociétaire à la Société des Poètes
français et membre du P.E.N. Club
français.
■ André MATHIEU a publié aux
Editions L’Harmattan Capone Une
histoire de Brigands. A l’occasion de
deux séjours à Chicago, l’auteur s’est
intéressé au héros local qu’était Al
Capone, figure emblématique de la
prohibition et de la lutte entre gangs
durant les années vingt aux EtatsUnis. Ami et traducteur de Chester
Himes, André Mathieu a consulté des
documents inédits pour retracer la
vie du sulfureux personnage, depuis
ses débuts comme plongeur de restaurant italien à New York jusqu’à sa
mort de paisible retraité du crime à
Miami en 1947.
■ Odile FELGINE vient de faire
paraître aux éditions L. et G. ;
Pieters-Art In Progress un ouvrage
sur Jacques VILLEGLÉ. Odile FELGINE, déjà biographe de Roger
Caillois et de Victoria Ocampo,
auteur d’un essai sur Henri Michaux,
poète, romancière, vient de consacrer
à l’affichiste français une imposante
biographie très richement illustrée,
préfacée par l’artiste Arnaud LabelleRojoux. Un ouvrage de référence
pour qui veut tout connaître et tout
voir de cet artiste essentiel de l’art
contemporain.
■ Jean-Pierre MOULIN a fait
paraître aux éditions (suisses) PubliLibris Grand bal au carrefour préfacé par Gilles Lapouge. Les chansons
– paroles et musique - écrites par
série de poèmes et d’œuvres plastiques. Il a déjà publié une quinzaine
de livres et l’exposition mettait en
évidence le parcours où se rencontrent ses textes et sa recherche plastique.
■ Nicole BARRIERE a fait paraître
son dernier recueil de poésie Et si
c’était elle aux Editions L’HARMATTAN. Elle a également procédé
à l’enregistrement d’un CD de 12
poèmes d’amour intitulé En la belle
endormie avec des musiques de
Pierre Attaignant.
Nicole Barrière est secrétaire général
adjointe du PEN Club français
Jean-Pierre MOULIN ont séduit les
plus grands interprètes de l’âge d’or
de la chanson française comme
Renée Lebas, Léo Marjane, Béatrice
Moulin, Edith
Piaf, Maurice
Chevalier, Philippe Clay, Sacha
Distel, Félix Martin, Mouloudji,
Serge Reggiani et ont fait le tour du
monde, comme « Le danseur de
Charleston » par exemple. JeanPierre MOULIN, journaliste, animateur de radio et de télévision, est
aussi poète, parolier, musicien.
■ Francis COFFINET a publié aux
Éditions Dumerchez Les fleuves du
sixième sens. A cette occasion,
Francis COFFINET, poète et plasticien, a été invité par le Festival Art,
Culture et Spiritualité en la basilique
Saint-Urbain de Troyes (Aube) du 8
juin au 31 août 2007 à présenter une
■ Françoise LECLERC a publié au
Temps des Cerises Loup, pourquoi te
caches-tu ? Dénonçant l’absurdité
du discours et des comportements et
de la bonne conscience des vainqueurs qui envoient Bamboté aux
Chemins des Dames et le traine-misère à la Soupe Populaire, la poète fait
retour à la petite maison qui trotte
dans la tête de chacun et se souvient
des amours d’antan, de la jeunesse et
des petits bonheurs du petit quotidien.
■ Athanase VANTCHEV DE
THRACY a publié aux Éditions de
l’Université “ Saints Cyrille et
Méthode “ Veliko Tarnovo (Bulgarie)
un recueil de poésies “et la mer devenait chant”, en édition bilingue français et anglais, la traduction anglaise
étant faite par son ami le poète
anglais Norton Hodges. Athanase
Vantchev de Thracy a déjà publié 28
recueils de posésie.
9
ILS ONT PUBLIÉ
■ Christophe DAUPHIN a donné
à la collection Les Cahiers du Sens,
chez “Le nouvel Athanor”, un choix
de poèmes 1985 - 2006, “Le gant
perdu de l’imaginaire”, qui sont
autant de voyages dans l’impatience
et la curiosité du monde.
SENGHOR
La première édition critique de
l’œuvre poétique de Leopold
Sedar Senghor vient de paraître;
elle s’appuie sur un certain nombre
de manuscrits annotés, et commentés par des spécialistes de diverses
nationalités. C’est le premier tome
d’une édition qui se propose de
publier la totalité de l’œuvre de
Senghor.
Leopold Sedar Senghor, poésies
complètes, édition critique sous la
direction de Pierre Brunel, Planète
libre, CNRS Éditions
2007, 1313 pages 30 ■ Edmond REBOUL publie chez
L’Harmattan “Frog”, chronique
d’une éducation militaire dans une
France de 1936 entre souvenirs de la
première guerre mondiale et bruits
de bottes qui annoncent la seconde.
Un monde dont Edmond Reboul,
certes romancier mais aussi médecin
des armées, sait retrouver les couleurs et l’atmosphère.
PEN CLUB/ FONDATION LA POSTE : APPEL À CORRESPONDANCE
SUR LES ROUTES DE L’AÉROPOSTALE
Le PEN Club a engagé avec La
Fondation La Poste une réflexion
commune autour du thème
“Correspondances actuelles d’écrivains "sur les routes de
l’Aéropostale"
Notre intention est de susciter une
correspondance entre des écrivains
contemporains vivants dans les différents pays qui ont été concernés
par la grande aventure de l’aéropostale.
Trois continents seront donc
concernés l’Europe, l’Afrique et
l’Amérique latine.
Pour réaliser ces correspondances,
nous sollicitons tous les écrivains
sur la question "quel rôle de la littérature aujourd'hui pour faciliter
les échanges entre les hommes des
différents continents et c'éer une
réelle mondialité”.
Nous les invitons à entrer en correspondance avec d’autres écrivains dans les continents concernés
et établir ces échanges au moyen de
lettres.
L'objectif est d'en faire la publication avec La Fondation La Poste ,
afin de témoigner et éclairer l'obscur de notre temps par les valeurs
de la littérature, par la responsabilité des auteurs et le rôle humain de
l'échange .
De ces différentes correspondances
se dégageront des thèmes qui pourraient faire l’objet de rencontres
internationales et d’expositions,
montrant ainsi les valeurs universelles de la littérature et la diversité
des langues.
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JULES LAFFORGUE :
LES ŒUVRES COMPLÈTES, ENFIN….
par Jean-Pierre Moulin
Jules Laforgue est un cas particulier dans l’histoire de
la poésie française. Mort en 1897 à l’âge de 27 ans, ce
grand poète singulier est un mal-aimé des académies,
de l’université et des anthologies. Le Larousse dit avec
condescendance qu’il « écrivit des poèmes… » et
qu’il se distingua par « un style impressionniste… »
Pourtant l’étoile de Laforgue (le clignement d’un œil
ironique épris d’un idéal toujours déçu mais fasciné
par le quotidien) ne cesse, après plus d’un siècle, d’exprimer notre modernité : Dieu que la vie est quotidienne !
Cour de l’Impératrice à Berlin) finit par déplaire à
André Breton ; de même que ses rêveries très anglosaxonnes (humour et non sens) ; son attrait pour les
grands mythes de la littérature occidentale (Hamlet, la
Lorelei) (3) ; pour le fantastique urbain ; sa compassion pour les « petites âmes » ; ses évocations d’une
femme et d’un homme renouvelés : Oh ! Qu’une
d’elles un beau soir sût venir, ne voyant que de boire à
mes lèvres et mourir… Une sensibilité populaire et raffinée. Un détour par la chanson : Quand ce jeune
homme rentra chez lui, il prit à deux mains son vieux
crâne qui de science était un puits. Crâne mon vieux
crâne entends-tu la folie qui plane et qui demande le
cordon, digue dondaine digue dondon... Laforgue a
influencé la chanson française contemporaine de
Trenet, Ferré, Gainsbourg, Higelin.
Il a fallu attendre l’année 2005 pour qu’une biographie
paraisse enfin (1) et surtout pour que l’œuvre complète voie le jour chez Dimitrievic à L’Âge d’Homme (2).
La Pléiade qui a consacré à juste titre de nombreux
écrivains authentiques, mais aussi quelques fausses Il y a enfin dans la riche personnalité de ce poète qui
suscite aujourd’hui de plus en plus d’intérêt, un sentivaleurs, pourrait faire son mea culpa…
ment tout à fait actuel de l’infinitude du ciel et du cosLaforgue a passionné en France et à l’étranger qualité mos, de la trace dans l’âme humaine des temps imméd’esprits parmi les plus remarquables : Drieu La moriaux et d’un futur qui va bouleverser jusqu’à nos
Rochelle, André Malraux, Philippe Soupault, Pascal repères établis par la convention et les habitudes. On
Pia, Paul Eluard, André Gide, Henri Michaux. Il a entre avec un plaisir qui ne cesse de grandir dans la fulinspiré nombre d’écrivains en Angleterre et aux Etats- gurante et mystérieuse poésie de Jules Laforgue – si
Unis dont Thomas S. Eliot, Lawrence Durrell. Il faut familière et tendre pourtant. On ne le lâche plus, il
souligner que Laforgue, qui lisait l’anglais et l’alle- devient un compagnon, mieux un contemporain. Il
mand, fut le premier à traduire Walt Whitman, célé- semble écrire pour notre XXIème siècle, deviner les
brant dans un poème le Far West, pour m’y scalper de formidables bouleversements de la science et des techniques. Ecologiste avant l’heure, il regarde mi-amoumon cerveau d’Europe.
reux, mi-tragique, la Nature parcourue par les grands
Les deux grands de la poésie française de la fin du deuils du vent et la tristesse éternelle des bêtes…
XIXème, Rimbaud et Lautréamont, ont certainement
contribué à isoler Jules Laforgue dans le foisonnement
des versificateurs fin de siècle. La critique y a mis du
Jean-Pierre Moulin
sien : « M. Laforgue a compliqué la langue jusqu’à la
rendre le plus souvent inintelligible. » lit-on dans La
Revue contemporaine en 1885. Les Surréalistes
auraient pu adopter Jules Laforgue (certains le firent) 1 . Jules Laforgue par J.J. Lefrère. Ed. Fayard
comme un inspirateur, un porte-drapeau : Aux armes 2 . Jules Laforgue. L’œuvre complète : 3 volumes
citoyens, il n’y a plus de raison ! Le poète a pressenti 3 . Les Moralités légendaires
en effet l’inconscient freudien, il met à sac parfois les
règles du « bon goût » et du sentimentalisme « bon
genre ». Mais son côté allemand (il fut lecteur à la
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LE DÉCÈS DE PIERRETTE MICHELOUD
Dans la nuit du 13 au 14 novembre la
poétesse d'origine suisse Pierrette
Micheloud est décédée sur les bords
du Léman, âgée de 92 ans, des suites
d'un cancer qui la rongeait depuis plusieurs mois. Elle offre l'exemple d'une
vie consacrée entièrement à la poésie
avec vingt-cinq recueils publiés chez
divers éditeurs - notamment Pierre
Seghers,
L'Harmattan,
L'Âge
d'Homme – et quelques ouvrages en
prose dont deux consacrés à ses souvenirs d'enfance.
Pierrette Micheloud s'est s'installée à
Paris en 1952 afin de mieux poursuivre une carrière littéraire entamée
sept ans auparavant avec un premier
livre édité à Lausanne. Dès lors, elle
ne cessera d'écrire, de peindre aussi,
et fournira sans désemparer d'innombrables chroniques de poésie à des
journaux parisiens, entre autres Les
Nouvelles Littéraires, et à des quotidiens et hebdomadaires de son pays
natal, sans compter une multitude de
petites et moyennes revues d'ici et
d'ailleurs. Le monde des revues, précisément, lui deviendra familier de
l'intérieur puisqu'en 1969 elle est
nommée rédactrice en chef de La Voix
des Poètes qui, fondée par Simone
Chevalier, existait depuis près de
deux décennies déjà. Dans son sillage
est créée la collection Les Pharaons,
chaque livraison constituant un dossier sur un poète du passé ou contemporain.
Entretemps,
Pierrette
Micheloud aura créé avec Edith Mora
le Prix Louise Labé, remis chaque
année à Paris à un auteur pas forcément confirmé mais en chemin et
témoignant d'une démarche originale.
Le jury offre la particularité d'être
composé exclusivement de femmes,
afin de contrebalancer un tant soit peu
leur faible nombre, du moins dans les
années 60, au sein d'autres panels littéraires.
Parmi les prix qu'elle-même a reçus
citons: Edgar Poe (1967), Apollinaire
(1984), Charles Vildrac (2000) créé
par la Société des Gens de Lettres. En
Suisse: le Schiller (1980) et celui de
Consécration de l'Etat du Valais pour
l'ensemble de son œuvre.
Francophone de cœur, universelle
dans l'âme, Pierrette Micheloud a su,
malgré son caractère parfois anguleux, se créer de solides amitiés non
seulement dans ses terres d'adoption
mais également en Belgique, au
Luxembourg, et surtout au Québec où
elle retrouvait ses chers confrères et
consœurs Rina Lasnier, Claude
Beausoleil et Helène Dorion. Pour
n'en citer que trois. On est surpris de
constater avec combien de poètes de
valeur elle entretenait d'étroites relations, une partie de ceux-ci se retrouvent dans le livre d'hommages
Présence de Pierrette Micheloud
édité en 2002 aux Editions
Monographic sous la direction de
Jean-Pierre Vallotton.
Sa vie et son œuvre étaient symbiose,
traversées par le souffle de la libre
pensée, l'esprit des mythologies, les
traditions ésotériques et par toute
forme de philosophie menant à l'éveil
et à la conscience, deux notions
majeures dans son système de
valeurs. Féministe de la première
heure, pacifiste absolue, axée vers le
devenir essentiel de l'être humain elle
n'en sera pas moins l'une des initiatrices du mouvement pour les droits de
l'animal, et avec la même ardeur s'engagera jusqu'à la fin contre la déprédation de la nature. Très tôt, elle se solidarisera avec les causes de son ami
Franz Weber. Pierrette Micheloud gardait intacte sa faculté d'indignation en
toute circonstance. Elle aimait l'idée du
combat lorsqu'il s'associait à ses
idéaux, mais son univers était aussi le
rêve et le merveilleux. Son regard bleu
d'ancolie semblait aller au-delà de ce
qu'il observait.
Sa poésie connaîtra diverses phases.
Toujours elle sera très construite,
chaque vers étant dûment réfléchi, ne
laissant rien au hasard. Le fond et la
forme intimement liés.
Certains auront connu son minuscule
appartement au 5 de la rue Perronnet
où elle avait reconstitué le décor et
l'ambiance du chalet valaisan, un gîte
montagnard au cœur de la métropole.
Sur le plan matériel Pierrette
Micheloud se contentait du strict minimum, pratiquant une ascèse joyeuse en
vivant de trois fois rien. Nous aimions
l'entendre relater les nombreux étés
qu'elle passait à parcourir l'une après
l'autre ses rudes vallées alpestres, à
pied ou à bicyclette, et, le soir venu,
s'arrêter dans un village pour réciter
longuement ses vers devant des populations ravies qui de la poésie ne
connaissaient que le nom. Elle perpétuait ainsi à sa manière la geste des
troubadours.
Pierrette va nous manquer. Son œuvre
et sa mémoire seront néanmoins préservés grâce à une fondation et un prix
de poésie à son nom.
Jacques Tornay
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QUELLES ACTIONS POUR LES ÉCRIVAINS PERSÉCUTÉS ?
Le Comité des écrivains en prison du PEN International a en charge l’une des missions centrales du mouvement. Dans un monde qui a beaucoup changé, ses missions sont à compléter.
Le 15 novembre était, comme désormais chanque année, le jour des écrivains en prison dans le monde, à l’initiative de PEN International. C’est,
pour le mouvement, le moment de
l’année où il peut dresser une sorte
d’état des lieux, des progrès ou des
reculs de la liberté d’écrire dans le
monde. Le bilan qui a été dressé cette
année montre hélas une situation dont
on ne peut se réjouir : entre novembre
2006 et novembre 2007, PEN
International a relevé des centaines
d’écrivains et de journalistes détenus,
et 42 assassinés. Cette année, le PEN a
voulu mettre l’accent sur cinq cas :
- le poète et comédien birman Maung
Thura (‘Zargana’), arrêté lors de la
répression qui a suivi les manifestations de cet automne (il avait déjà
passé plusieurs années en prison)
- le journaliste cubain Normando
Hernández González, 38 ans, emprisonné depuis 2003, et condamné à 25
ans de prison pour “mise en danger de
l’indépendance de l’État et de l’intégrité territoriale”. En mauvaise santé,
il a été transféré en septembre dans un
hôpital militaire.
- la journaliste gambienne Fatou Jaw
Manneh, menacée de prison pour des
articles critiquant le Président gambien
- le romancier iranien Yaghoub Yadali,
poursuivi à diverses reprises, et
condamné à de la prison - encore en
septembre dernier - pour le contenu de
ses romans.
- le journaliste ouzbek Jamshid
Karimov, condamné pour avoir dénoncé des atteintes aux droits de l’homme
qui l’ont conduit à être détenu dans un
hôpital psychiatrique.
Pour ces auteurs persécutés, le PEN
International et les PEN nationaux
interviennent en protestant auprès des
pays et de leurs ambassades. Les interventions ne sont pas des coups d’épée
dans l’eau, et le fait de porter un cas
sur le devant de la scène internationale
continue de produire des effets positifs
pour certains de nos amis.
Mais le monde d’aujourd’hui et ses
entraves à la liberté d’expression ne se
réduisent pas à l’arithmétique des écrivains emprisonnés. La machine liberticide, alors que les démocraties font
figure d’ilôt fragile, a pour se nourrir
des aliments nombreux et variés : dans
le plus doux des cas, intimidations et
menaces qui conduisent à l’autocensure dans un climat de peur permanente,
et dans les plus durs, l’assassinat pur et
simple, dont la figure emblématique
reste celle d’Anna Politovskaïa.
La mission de veille des PEN Clubs
doit donc s’élargir à une sensibilisation
à la situation générale de certains pays
et des difficultés qu’y vivent les écrivains. C’est dans ce sens que nous
devrons aller de plus en plus.
PATRICK MORELLI
Patrick Morelli est mort en septembre.
Acteur, auteur, metteur en scène, il
avait été parmi les premiers à se saisir
du multimedia comme vecteur de création.
Les huit dernières années de sa vie, il
avait conçu et animé un site internet de
création poétique, La lune et les étoiles
(lunetoil.net) qu’il alimentait quotidiennement avec des amis photographes (ci-contre, Patrick Morelli par
l’un des photographes associés, Pascal
Dolémieux) et écrivains.
Patrick Morelli était un membre fidèle
du PEN Club. Il apportait aussi sa
compétence et son sens prospectif à la
commission audiovisuel et multimedia
de la SGDL.
Il était un ami sachant transmettre ses
visions de l’avenir et les transformer
en désirs d’action. Naturellement, il
était encore plein d’idées qui avaient
quelques longueurs d’avance. Ces
idées vont nous manquer, comme man-
queront sa chaleur, son rire et son
enthousiasme.