1 Les auxiliaires d`élevage et la profession vétérinaire dans le

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1 Les auxiliaires d`élevage et la profession vétérinaire dans le
Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adapter les règles, les politiques et les institutions
Mombasa, Kenya, 15-18 octobre 2002
Les auxiliaires d’élevage et la profession vétérinaire dans le contexte de la privatisation en
Afrique
D. K. Leonard, Ph D., C. Ly, DMV; et P.S.A. Woods, BVSc, Ph.D.1
Ils sont respectivement de l’Université de Californie à Berkeley, de l’Ecole Inter-Etats des Sciences et Médecine
Vétérinaires de Dakar et de l’Université du Zimbabwe à Harare
En Afrique, l’avenir de la pratique vétérinaire n’est pas encore déterminé. Historiquement, les vétérinaires (docteurs
vétérinaires), au sens strict, étaient à la fois au centre et à la périphérie des services offerts aux éleveurs africains.
Aujourd’hui, ils courent le danger de se retrouver seulement à la périphérie. L’organigramme de la médecine vétérinaire
développé à l’ère coloniale et parachevé par les gouvernements dans les premières années de leur indépendance avait
positionné les para-professionnels vétérinaires en première ligne des services vétérinaires, mais ces derniers opéraient
strictement sous le contrôle de leurs supérieurs hiérarchiques vétérinaires. Si on ne prend en considération que les
niveaux de formation, l’accent mis actuellement sur les auxiliaires d’élevage est une remise à jour de la pratique
coloniale. Cependant, en termes d’autorité et de financement, les auxiliaires d’élevage sont des éléments nouveaux.
Avec l’effondrement des allocations budgétaires aux services vétérinaires publics dans les années 80, la médecine
vétérinaire privée est devenue de plus en plus importante. Néanmoins, on court le risque considérable de la voir
dominée par les para-professionnels qui, par voie de concurrence, pourraient en arriver à exclure les vétérinaires du
marché, échapper à leur supervision et les réduire au simple rôle de grossistes en médicaments. Cette évolution menace
non seulement la profession vétérinaire elle-même, mais aussi la prophylaxie et les fonctions de santé publique (le
mandat sanitaire) dont elle est responsable. A moins qu’elle ne trouve de nouvelles manières de fonctionner, la
profession vétérinaire, ainsi que la qualité de la santé animale sur le continent, seront sévèrement affectées.
1. Distinctions et définitions
Avant de commencer, il faut clarifier quelques distinctions et termes élémentaires. La santé animale implique une
gamme complexe de fonctions et ceux qui les exercent ont également des compétences très variables. Il n’y a pas de
catégorie de prestataires de services qui soit la plus compétente pour toutes les fonctions, et toutes les fonctions ne
doivent pas être remplies de la même manière dans tous les systèmes de production. Dès lors, si l’on veut éviter le
dogmatisme, il nous faut procéder en finesse pour établir un lien entre les différents aspects de la santé animale et les
diverses méthodes de gestion de ces derniers dans différentes conditions de production.
1.1. Il y a trois types fondamentaux de médecine vétérinaire que nous désirons garder à l’esprit. Leur nature et les
motivations qui les animent sont quelque peu différentes, ce qui suggère que des arrangements organisationnels
valables pour un type de médecine vétérinaire ne le sont pas forcément pour un autre.
1.1.1.
1.1.2.
1.1.3.
La médecine curative permet le traitement des maladies. Comme elle implique une intervention spécifique en
réponse à un problème qui peut être clairement perçu par l’éleveur qui tire aussi pleinement avantage du
traitement, elle représente la partie de la médecine vétérinaire qui est la plus facilement privatisable.
La médecine vétérinaire préventive comprend les vaccinations et d’autres interventions pour empêcher la
transmission des maladies. Les vaccinations contre les maladies prévalentes et aisément reconnaissables sont
rapidement appréciées à leur juste valeur par les producteurs et leur administration peut donc souvent être
privatisée comme en République centrafricaine et en Ouganda pour la peste bovine (Koma, 2000 ; Tacher,
1986). Quand l’immunité du troupeau est assurée, il est difficile de convaincre les éleveurs traditionnels de
maintenir le niveau de vigilance requis et il faut fréquemment avoir recours à des interventions du secteur
public (par exemple, au Sénégal comme décrit par Ly, 2000) Dans ce dernier cas, le producteur individuel peut
être tenté de «resquiller» sur les actions des autres et une forme d’action collective est alors nécessaire pour
maintenir l’immunité du troupeau. La prophylaxie par le contrôle des déplacements du bétail ne peut être
réalisée que par le biais du pouvoir coercitif de l’Etat.
La pratique vétérinaire promotionnelle comprend toutes les mesures de gestion conçues pour améliorer la
productivité des animaux et leur santé générale. Sauf pour les mesures de conservation des pâturages, tout le
bénéfice de ces mesures revient à l’éleveur individuel, mais puisque l’intervention extérieure ne consiste
souvent en rien de plus que de l’information (conseils), elle est trop difficile à vendre sur le marché privé. Il y a
une exception importante à cette règle : lorsque la pratique de gestion améliorée implique l’achat d’intrants. Le
1
Tous les trois, nous souhaitons reconnaître avec gratitude que pratiquement tout le travail de recherche dont nous
établissons le rapport dans cette note, a été financé par une subvention du gouvernement néerlandais par le biais du
Centre de recherche pour le développement international à Nairobi au Kenya. Cependant, nous sommes seuls
responsables des points de vue exprimés dans ce document
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fabricant de cet intrant a alors financièrement intérêt à fournir gratuitement la vulgarisation appropriée – que
l’on appelle généralement « publicité ».
1.2. Il y aussi des distinctions qui doivent être faites entre les types de praticien vétérinaire.
1.2.1.
1.2.2.
1.2.2.1.
1.2.2.2.
1.2.2.3.
1.2.2.4.
Les docteurs en médecine vétérinaire (DMV) sont des vétérinaires complets avec au moins un premier
diplôme universitaire dans le domaine.
Le terme de para-professionnel est appliqué à tous les travailleurs en santé animale qui n’ont pas de
qualification universitaire, en d’autres termes, qui ne sont pas des DMV. Dans cette catégorie, se retrouvent
deux types de praticiens différentiables, qui sont souvent pris l’un pour l’autre, mais que nous devons
différencier. Ce sont :
Les quasi-professionnels qui ont au moins une année de formation vétérinaire et le niveau de formation du
secondaire inférieur. Certains d’entre eux, comme les agents d’élevage au Kenya et les ingénieurs des travaux
d’élevage au Sénégal, ont un bagage de formation qui est proche de celui des DMV. D’autres peuvent avoir
bénéficié d’une formation moins importante, mais ils ont une base suffisamment solide pour leur permettre
d’accomplir les tâches pour lesquelles ils ont été formés, comme les techniciens vétérinaires d’élevage
(Zimbabwe), les assistants en santé animale (Kenya) et les agents techniques d’élevage (Sénégal).
Les auxiliaires qui ont moins d’un an (et parfois seulement quelques semaines) de formation vétérinaire et leur
formation générale est rudimentaire. Durant la période coloniale, ce personnel était appelé scouts vétérinaires
ou infirmiers d’élevage, mais jusque récemment la plupart des états africains indépendants recyclaient ou
désengageaient ce personnel qui était encore dans la fonction publique. Naturellement, ces auxiliaires des
services publics n’opéraient que dans des organisations où ils étaient directement sous la supervision de
docteurs et de quasi-professionnels.
Les auxiliaires réapparaissent actuellement sous un nouveau vocable d’auxiliaires d’élevage qui ont suivi
plusieurs sessions de formation vétérinaire d’une semaine et sont responsables devant (et généralement
sélectionnés par) leurs communautés. Les auxiliaires d’élevage se différentient des anciens auxiliaires publics,
plus par leur indépendance par rapport à une supervision vétérinaire formelle et le manque de salaire que par
leur niveau de formation et leur compétence. La délimitation est parfois vague – bon nombre d’auxiliaires
d’élevage souhaitent devenir employés au sein des organisations qui les ont premièrement formés et, par
conséquent, ils acceptent d’être supervisés par ces dernières, même s’ils n’en sont pas des salariés. En fait,
beaucoup deviennent des praticiens vétérinaires insuffisamment formés, et qui ne répondent à la demande de
leurs communautés que par le marché (les travaux de recherche de Ly (2002) dans le Ferlo sénégalais
suggèrent que le contrôle des auxiliaires d’élevage par leur communauté s’est très rapidement érodé, mais que
la plupart finit par opérer sous une forme ou l’autre de supervision de la part des DMV du privé ou d’une
ONG.
A l’autre extrême de la catégorie des auxiliaires, on trouve des producteurs reconnus par leurs pairs comme des
experts locaux. Ils ont généralement reçu une formation rudimentaire dans le passé, mais ne sont plus en
contact avec un système de formation. Woods (2001) a conclu qu’au Zimbabwe, 1/3 des consultations faites
par ces experts locaux ont fait l’objet d’une forme de compensation.
1.3. Enfin, il y a une multiplicité de types de système de production. Le fait qu’une structure de services vétérinaires est
approprié, dépend considérablement de la nature du système de production. Pour l’Afrique, il convient de faire les
distinctions suivantes :
1.3.1.
1.3.2.
1.3.3.
1.3.4.
Pastoral : Ces systèmes ne sont que partiellement commercialisés, ont une productivité modérée ou faible, ne
comprennent que des races de bétail traditionnelles qui sont bien adaptées à l’environnement africain, sont très
dispersés et le plus souvent migratoires (transhumance). Les gardiens de troupeau sont souvent très
expérimentés et gèrent des troupeaux suffisamment importants pour pouvoir diagnostiquer les maladies les
plus courantes. Les coûts d’intervention sur les animaux malades dans ces systèmes, surtout par rapport à leur
valeur économique, sont souvent prohibitifs.
Les producteurs traditionnels sédentaires gèrent des races indigènes en petit nombre. La valeur des animaux
n’est pas élevée mais ces producteurs n’ont pas assez d’expérience pour pouvoir traiter réellement les animaux
eux-mêmes. Les déplacements représentent la majeure partie des dépenses pour avoir accès aux soins
vétérinaires.
La production commerciale de moyenne envergure travaille avec des animaux exotiques et hybrides à des fins
commerciales. Elle est souvent locale et produit généralement des produits laitiers. Le producteur possède peu
d’animaux et il a souvent peu d’expérience par rapport aux maladies. Les frais de déplacement demeurent un
obstacle, mais la valeur des animaux rend les services vétérinaires généralement rentables.
Les systèmes de production à haute valeur commerciale exploitent des races exotiques et sont gérés de près par
des producteurs qui ont une formation et un nombre de têtes de bétail suffisants pour leur permettre de fournir
eux-mêmes des services vétérinaires de base. Quand de tels producteurs demandent des services professionnels
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vétérinaires, la valeur des animaux et les moyens d’accès au troupeau rendent généralement le recours à des
DMV rentable.
2. Une privatisation sélective
2.1. Après vingt ans de crise économique en Afrique, il est évident que l’Etat ne peut pas fournir tous les services en
santé animale comme il y aspirait pendant la période faste après l’indépendance. La crise a laissé les éleveurs sans
services vétérinaires essentiels ; les a obligés à avoir recours à des praticiens et pharmaciens illégaux et peu fiables du
secteur informel (Ly, 2002) ; les a forcés de payer des pots-de-vin aux agents des services publics (Léonard, 1987) ou,
encore, les a projetés dans un contexte de pratique privée libre appuyée et en partenariat avec le gouvernement.
2.2. De ces quatre alternatives, la dernière est de loin la meilleure – au moins pour les producteurs. Elle leur permet
d’obtenir des services dont dépend leurs moyens d’existence, elle rend les praticiens plus à même de répondre à la
demande des consommateurs et elle permet au gouvernement de concentrer ses ressources sur la prévention et la santé
publique vétérinaires – où les rentrées sont les plus élevées et le secteur privé le moins performant.
2.3. En principe, on pourrait penser que le recouvrement des coûts règlerait les problèmes suscités par la crise
économique en Afrique – il procure les finances manquantes tout en laissant les structures publiques traditionnelles en
place. Désormais, cependant, nous savons que cette alternative a tous les effets négatifs du marché, mais a aussi
quelques effets positifs – elle impose un prix au producteur mais ne change rien au système de primes d’encouragement
qui régit le système public. Cela mène donc à un système inefficace qui ne répond pas à la demande. Il y a danger que
les nouveaux fonds recouvrés soient absorbés par les procédures financières courantes de l’Etat ou par la corruption.
Même si ces fonds aboutissent et permettent la constitution de stocks de produits vétérinaires adéquats, l’achat de
moyens de transport en bon état et des salaires pour les prestataires mieux adaptés ; ils ne changent rien aux structures
de gestion du secteur public. Dès lors, le personnel peut continuer à fournir gratuitement des produits vétérinaires à
leurs amis, à utiliser les véhicules de service à des fins personnelles, à utiliser le matériel sans en prendre soin ; et à
refuser de répondre aux demandes de services qui ne lui convient pas. L’imposition de paiements ne crée pas de
motivations supplémentaires pour les prestataires de services du secteur public ; ils n’en deviennent pas plus efficaces et
plus responsables pour autant.
2.4. Les objections faites par rapport à l’expansion des services vétérinaires privés sont au nombre de trois :
2.4.1. Premièrement, les producteurs seraient plus favorisés par le vieux système gratuit ou hautement subventionné qui
avait été créé après l’indépendance. Cette affirmation est juste mais n’est actuellement plus pertinente parce que les
fonds publics nécessaires au fonctionnement de ces systèmes ne sont plus disponibles. Le fait de prétendre qu’ils
peuvent être réintroduits ne fait que prolonger la période pendant laquelle les services vétérinaires économiquement
essentiels pour les éleveurs ne seront pas fournis. Il n’est même pas sûr que le fait que l’Etat paie partiellement les coûts
liés à son personnel en santé animale et que les producteurs paient la différence, fasse diminuer les prix. Au Kerala et au
Rajasthan en Inde, Ahuja (2000) en sont arrivés à la conclusion que les praticiens privés et les prestataires de services
publics subventionnés pratiquent les mêmes tarifs. Les constations de Woods suggèrent que c’est aussi le cas pour de
nombreux services au Zimbabwe.
2.4.2. Deuxièmement, les pauvres sont désavantagés par le marché. A première vue, cela paraît plausible dans un
marché dominé par l’argent et où les pauvres en ont moins que les autres. Cependant, nous disposons de suffisamment
d’éléments qui prouvent que cet argument est faux. En ce sens, les pauvres ne constituent pas un cas particulier.
2.4.2.1. Les études réalisées suggèrent que les pauvres sont moins susceptibles d’avoir accès aux services publics
subventionnés que les riches, car le pouvoir et l’influence sont répartis de manière encore plus inégale que l’argent
(Leonard, 1977, 1987 ; Ahuja, 2000 ; Woods et al., et ultérieur). Les pauvres ont souvent un meilleur accès aux soins
vétérinaires quand on pratique des prix réalistes que quand ils sont largement subventionnés (Léonard, 1987 ; Gros,
1994). Les pauvres acceptent autant que les riches de payer pour avoir accès aux services vétérinaires dont ils ont
besoin (Ahuja, 2000 ; Koma, 2000). Par exemple, Leonard (1987) a conclu que lorsque les agents du service public ont
cessé de dispenser des services gratuits et ont commencé à les faire payer ; les éleveurs les plus pauvres ont été capables
de faire appel aux prestataires de services pour traiter leurs animaux plus fréquemment et les avantages des riches en
matière d’accès aux services vétérinaires ont diminué. Des études en Ouganda et en Inde n’ont pas réussi à démontrer
que les pauvres avaient moins exploité les services commercialisés de santé animale que les riches (Koma, 2000 ;
Ahuja, 2000). L’enjeu pour les pauvres n’est pas de savoir s’ils peuvent payer les soins vétérinaires, mais plutôt de
savoir s’ils peuvent y avoir accès.
2.4.2.2. L’un des aspects pour lesquels les pauvres constituent un cas spécial est qu’il y a diverses choses à faire dans
les zones géographiques qui sont reculées et/ou qui dépendent d’un bétail à faible valeur commerciale. Cependant,
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cibler des individus pauvres ne semble pas réalisable ou nécessaire. Même dans les zones les plus pauvres, le défi est
d’instaurer un système de subventions qui rendra les praticiens vétérinaires disponibles et non d’essayer de verser des
subventions spéciales aux pauvres qui y vivent. Le travail de Woods (2000 et ultérieur) au Zimbabwe enregistre une
chute considérable du recours aux soins vétérinaires lorsque le prestataire se trouve à distance. Les frais en temps et de
transport pour fournir les services de santé animale sur le site de l’élevage comptent souvent plus au moment de la
demande effective que les honoraires professionnels. Ahuja (2000) en est arrivé aux mêmes conclusions en Inde (2000).
2.4.2.3. Evidemment, il y a du mérite d’un point de vue moral à cibler les pauvres en matière d’assistance, mais on a la
preuve que très peu d’organisations (sauf quelques ONG) sont en mesure d’y arriver dans les conditions du monde rural
en Afrique. L’élément crucial est de mettre les services à la disposition des pauvres, même s’il y a un prix à payer.
Après tout, le bétail a une valeur en tant que capital de production et même les pauvres peuvent trouver les moyens de
payer afin de préserver leur capital économique.
2.4.3. Troisièmement, le marché livré à lui-même ne permettra pas de solutionner certains aspects essentiels de la santé
animale – la qualité, la prévention et la promotion. C’est vrai et nous allons maintenant nous attarder sur ces challenges.
3.
Les origines des challenges
3.1. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles les DMV survivent difficilement et les auxiliaires d’élevage sont plus
favorisés dans les marchés vétérinaires qui sont davantage privés aujourd’hui. L’une d’elles est un réel challenge pour
le rôle des DMV. Les deux autres dénotent cependant des imperfections du marché qui doivent être rectifiées si les
intérêts des producteurs sont d’être bien servis.
3.2. Le premier de ces challenges se situe au niveau économique des services vétérinaires qui doivent être dispensés. Il
y a plusieurs circonstances dans lesquelles les services d’un DMV sont simplement trop chers pour être adéquats :
3.2.1. Les animaux ont une faible valeur.
3.2.2. Le problème médical est facilement reconnaissable et dans le champ d’expertise d’un producteur expérimenté,
d’un auxiliaire d’élevage ou d’un para-professionnel, qui peuvent offrir un service à un coût nettement inférieur que le
DMV ; ou
3.2.3. Les frais de transport et en temps pour avoir accès aux services d’un DMV sont élevés (Woods, 2000).
Dans aucune de ces circonstances, il n’y a de sens à essayer d’imposer le DMV au producteur. Cela ajouterait des coûts
sans garantie, ce qui dans tous les cas serait un échec (Odeyemi, 1996 ; Sere, 1979).
3.3. Le deuxième challenge est illégitime et survient quand il est difficile de déterminer la plus-value qu’apporterait un
praticien vétérinaire expérimenté. Les marchés de tous les services médicaux sont perturbés par des informations
dissimulées, ou par ce que les économistes appellent « asymétrie de l’information » (connaissances inégales). Dans la
plupart des cas, le producteur trouve très difficile de juger si un praticien vétérinaire donné fournit réellement des
services de qualité supérieure et, par conséquent, il n’est pas prêt à payer plus que pour un prestataire d’un niveau
inférieur. Donc le para-vétérinaire ou l’auxiliaire d’élevage prend facilement le dessus sur le DMV même si les services
de ce dernier sont nécessaires et rentables. Il est vrai que quand un vétérinaire pratique la chirurgie sur un animal, les
différences avec le para-vétérinaire en termes de formation et de compétence sont visibles et les données disponibles
montrent que même les éleveurs traditionnels paieraient pour un tel service (Koma, 2000 en Ouganda). L’élément
supplémentaire, en termes de qualité, fourni par les meilleurs praticiens est le diagnostic – en outre, cela augmente la
probabilité d’identifier les maladies difficiles à détecter et d’avoir des prescriptions de médicaments correctes. Les
éleveurs peuvent savoir que les DMV ont plus étudié que les para-professionnels ou les auxiliaires d’élevage, mais ils
peuvent ne pas être au courant du niveau d’expérience ou de compétence du DMV ; et ils ne savent certainement pas
dans quelle mesure l’intervention du DMV est efficace ou honnête. Etant donné que certains animaux traités
correctement ne vont cependant pas guérir et que d’autres bien que mal soignés vont se remettre, il peut être très
difficile pour l’éleveur de juger de la qualité des services offerts par le praticien ; sauf s’ils ont des contacts
professionnels fréquents. Comme la plupart des maladies touchant le cheptel africain sont aisément diagnostiquées et
traitées par les para-professionnels et les auxiliaires d’élevage, et que la plupart des éleveurs sédentaires ont de petits
troupeaux, il est difficile pour eu d’acquérir une expérience révélatrice par rapport aux DMV. Le résultat est que les
producteurs ne veulent pas payer les DMV plus que les para-professionnels - sauf quand la chirurgie est indiquée ou
quand des mécanismes institutionnels permettent d’apaiser leur méfiance.
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3.4. Le troisième challenge pour la survie des DMV dans un marché vétérinaire de plus en plus privatisé est inhérent à
la pratique de la médecine vétérinaire préventive et promotionnelle. Bien que ces deux aspects des sciences vétérinaires
soient plus importants pour réduire l’impact des maladies et augmenter la productivité animale que le sont les soins
curatifs, il est plus difficile de les rendre payants.
3.4.1. Les informations fournies par le DMV sur les pratiques améliorées de gestion peuvent facilement être transmises
entre producteurs sans impliquer à nouveau le DMV.
3.4.2. Les mesures préventives, y compris les vaccinations, présentent une autre série de problèmes.
3.4.2.1. D’abord, une fois que l’immunité est acquise, le troupeau d’un producteur sera protégé même si aucune
vaccination n’est administrée. Puisque la vaccination comprend souvent des risques collatéraux et peut compromettre la
production au moins de manière temporaire, il est dans l’intérêt des producteurs individuels de ne pas protéger leur
propre troupeau s’ils croient qu’un nombre suffisant d’autres éleveurs protégera leurs animaux. Ce problème est
classique lors d’actions collectives. Par conséquent, comme mentionné précédemment, les éleveurs ougandais et
centrafricains désiraient payer la vaccination contre la peste bovine au moment où la maladie représentait une sérieuse
menace (Tacher ; 1986 ; Koma, 2000), mais ils étaient moins intéressés de le faire dans le Ferlo sénégalais où la
maladie avait été repoussée avec succès depuis plus de 15 ans (Ly, 2000).
3.4.2.2. Ensuite, les avantages retirés des mesures préventives ne sautent pas toujours aux yeux de l’observateur peu
averti. Des animaux non vaccinés peuvent échapper à l’infection ou développer une forme fruste de la maladie, et moins
la maladie est endémique et plus il sera difficile d’en observer les probabilités. De plus, certains problèmes de santé
animale évitables (comme les vers) peuvent n’avoir qu’un léger effet sur la production plutôt que l’impact dramatique
de la mort. Dans ces deux cas, l’éleveur devra être persuadé de l’utilité des mesures de prévention. Si l’intervention est
payante, le degré de crédibilité par rapport au praticien l’ayant prescrite sera crucial. Cela constitue une autre variante
du problème des informations dissimulées susmentionnées - le vétérinaire recommande-t-il une mesure particulière car
elle est réellement utile ou parce qu’elle doit produire un profit ou qu’elle est imposée par un supérieur administratif ?
Pam Woods a constaté une augmentation des ventes de produits pharmaceutiques au Zimbabwe, quand les DMV ont
travaillé de concert avec les para-professionnels plutôt que de les laisser livrés à eux-mêmes (2001). Dans le Ferlo
sénégalais, Cheikh Ly en est arrivé à la conclusion que quand les éleveurs avaient confiance en l’intégrité du DMV ou
de son organisation (un programme d’élevage luthérien dans ce cas), ils achetaient nettement plus de traitements
prophylactiques fournis par les auxiliaires d’élevage que ces DMV supervisaient (Ly, 2000). Les marchés de la
prévention et de la promotion sont doublement imparfaits et il faut prendre des mesures institutionnelles afin de
résoudre les problèmes en la matière.
4. Comment structurer les nouveaux systèmes vétérinaires en Afrique ?
4.1. Les soins communautaires de santé animale font partie de la solution. Il nous faut faire plusieurs distinctions afin
de clarifier nos propos.
4.1.1. De manière générale, il a toujours été vrai, et c’est toujours d’actualité, que la valeur de la plupart de la
production animale en Afrique est trop faible pour justifier des soins vétérinaires administrés uniquement par des
vétérinaires (DMV). Il n’est pas seulement une question de prix qu’il faut payer pour quelqu’un ayant un niveau de
formation supérieur mais aussi de la situation géographique du praticien. Le déplacement (à la fois du praticien et du
producteur pour faire appel à des services) constitue le plus souvent des frais encore plus importants si l’on veut avoir
accès aux soins vétérinaires dans le contexte africain (Woods, 2000). Par conséquent, le praticien qui vit près du
producteur bénéficiera d’un avantage considérable sur le plan concurrentiel.
4.1.2. Une fois que l’on sait que les soins seront fournis par des non professionnels, la question est de savoir de quel
type il s’agit. Les services publics et la pratique privée ont tous inclus les quasi-professionnels et les auxiliaires
d’élevage. Les auxiliaires d’élevage sont effectivement des auxiliaires de la pratique privée. Il est, en effet, rare que les
communautés aient elles-mêmes les ressources ou les structures organisationnelles leur permettant d’employer ces
personnes - même si elles les avaient désignées au départ pour jouer ce rôle (et pour la formation que la requiert).
4.1.3. Les praticiens qui sont les plus menacés par les auxiliaires d’élevage sont les quasi-professionnels. Il y a
probablement des systèmes d’élevage en Afrique où il est préférable que l’on n’en arrive pas à une situation pareille –
des régions comme le centre du Kenya qui sont dominées par des producteurs commerciaux d’envergure moyenne ;
habituellement des producteurs laitiers avec des races exotiques ou hybrides. Il est recommandé que dans de tels
systèmes commerciaux, les énormes investissements faits dans le passé pour la formation des quasi-professionnels ne
soient pas anéantis en leur imposant la concurrence d’un nouveau contingent d’auxiliaires d’élevages. Les quasiprofessionnels doivent plutôt être une composante d’un nouveau système privé intégré.
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4.1.4. D’autre part, les systèmes de production pastoraux sont particulièrement désignés pour les auxiliaires d’élevage,
car les distances et le fait de devoir se déplacer avec les animaux rendent le travail peu attirant pour les quasiprofessionnels. De bons exemples sont les Peuls en Centrafrique (Tacher, 1986) et au Sénégal (Ly, 2000, 2002). Il est
probable que la valeur des auxiliaires d’élevage dépend énormément de la qualité des rapports entretenus avec les
professionnels vétérinaires ; une question à laquelle nous reviendrons ultérieurement.
4.2. Des rôles additionnels pour les auxiliaires d’élevage – la vulgarisation, la santé humaine et encore d’autres
options – sont dignes d’être prises en considération. Il est particulièrement important d’examiner cette question pour les
auxiliaires d’élevage intervenant dans le contexte pastoral - les distances impliquées réduisent l’intensité des activités
qu’un auxiliaire d’élevage peut avoir et restreignent l’accès des familles de producteurs à d’autres services qui sont
essentiels à la qualité de leur vie.
4.2.1. La vulgarisation n’aurait probablement jamais lieu si elle ne faisait pas office de produit dérivé des soins curatifs.
Cela veut dire que les auxiliaires d’élevage fournissent des informations qui améliorent leur réputation au moment où ils
répondent à des demandes de soins vétérinaires, mais il est peu probable qu’ils se déplacent spécialement pour fournir
de telles informations à moins que cela serve aussi à écouler les produits qu’ils transportent (Ly, 2002).
4.2.2. Majok et Schwabe (1996) ont longtemps plaidé en faveur de l’association des rôles en santé humaine et animale,
mais il n’est pas sûr qu’ils n’avaient pas à l’esprit les quasi-professionnels plutôt que les auxiliaires. Il nous semble que
l’option santé humaine dépend beaucoup du contexte. Les frais de transport sont une composante majeure des coûts du
consommateur pour tous soins de santé – mais encore beaucoup plus en santé animale qu’en santé humaine, car les
personnes sont plus faciles à transporter que les grands ruminants. De ce fait, l’association des pratiques n’a de sens que
dans le contexte pastoral pour lequel le fait d’être vraiment trop éloigné pose un problème. Cela a probablement du sens
d’impliquer les auxiliaires d’élevage dans la santé humaine, mais seulement pour la fourniture de produits
pharmaceutiques très courants (pour lesquels la prescription n’est pas vraiment requise) et pour les traitements
d’urgence pour les enfants de moins de cinq ans (comme la réhydratation par voie orale) pour lesquels la rapidité du
traitement est souvent une question de survie. L’option santé humaine est susceptible de provoquer la multiplication des
exigences relatives à la formation pour ces postes. En outre, puisque la plupart des auxiliaires d’élevage sont des
hommes, peut-être est-il préférable de destiner ces ressources additionnelles en formation à des femmes qui se
spécialiseraient en santé maternelle et infantile ?
4.3. La profession vétérinaire doit établir des liens. Les DMV ne peuvent et ne doivent pas entrer en concurrence avec
les quasi-professionnels ou avec les auxiliaires. Ils devraient articuler leurs interventions autour du travail de ces
derniers s’ils veulent pouvoir survivre en dehors de quelques-unes des niches du marché. La santé animale
communautaire est une option intéressante si les vétérinaires supervisent globalement les quasi-professionnels et les
auxiliaires d’élevage, soutiennent leur formation, les fournissent en produits pharmaceutiques et développent avec eux
des relations facilitant le renvoi vers un confrère (Ly, 2002). En ce moment, beaucoup de DMV privés sont réduits à un
rôle de grossiste, utilisant des auxiliaires d’élevage et les autres para-professionnels comme des points de vente. En fait,
la vente de produits pharmaceutiques représente plus de 80% du revenu des praticiens vétérinaires (Ly, 2002) et il serait
difficile pour eux de survivre économiquement s’ils n’étaient pas les principaux distributeurs de ces produits. Les DMV
ont acquis ce rôle de grossiste en médicament parce que la plupart des pays n’autorisent pas les non professionnels à
participer au commerce des médicaments et la réglementation crée, par conséquent, une niche relativement protégée
pour les DMV (Ly, 2002). Les médicaments contrefaits et la vente de médicaments par des personnes sans compétence
en diagnostic sont devenus un problème pour beaucoup de régions de l’Afrique (Koma, 2000 ; Ly 2002). Si seulement
on accordait le droit légal de superviser la vente des produits pharmaceutiques aux professionnels, cela aurait l’avantage
de créer des acteurs ruraux qui auraient intérêt à identifier les produits contrefaits et les charlatans. Il faudrait aussi leur
donner le statut leur permettant de mobiliser le gouvernement afin de poursuivre les ces derniers en justice. Si, d’autre
part, les DMV vendent des médicaments aux auxiliaires d’élevage et aux autres para-professionnels sans aucune
supervision de leur utilisation et si cette fonction vient à dominer complètement les moyens d’existence des DMV, cela
équivaudrait à un gaspillage de et une atteinte à leurs qualifications professionnelles.
4.4. Si l’on veut que les DMV supervisent les épidémies de maladies et qu’ils aient un effet significatif sur la qualité de
la santé animale, ils devront avoir une vraie relation avec les para-professionnels à qui ils vendent. A moins que l’Etat
n’interdise les activités des para-professionnels sans la supervision d’un vétérinaire (ce qui semble être fait efficacement
dans le sud de l’Afrique), la relation entre les DMV et les para-professionnels devrait se passer sous forme de
convenance mutuelle, impliquant d’étroites relations facilitant le renvoi vers un confrère et ce, dans les deux sens.
Comme mentionné précédemment, sauf pour la chirurgie, les DMV ont des difficultés à vendre leur expertise
spécifique, puisqu’une grande partie de leur travail fait l’objet de sérieux problèmes d’informations incomplètes, c’està-dire qu’une grande partie de la valeur de ce qu’ils ont à offrir n’est pas perceptible par l’éleveur. Les DMV auront
plus de réussite en développant des activités viables s’ils ont des rapports avec les ONG qui sont très respectées par les
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Les premiers soins de santé animale au 21ème siècle : adapter les règles, les politiques et les institutions
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populations locales et/ou ont des relations facilitant le renvoi vers un confrère avec des quasi-professionnels et des
auxiliaires d’élevage qui fournissent des services simples et réguliers aux producteurs et qui, par conséquent, ont eu
l’occasion de consolider une réputation de crédibilité auprès des producteurs (Ly, 2002). Les gains qui en découlent
sont importants à la fois pour les DMV et les auxiliaires d’élevage en termes de confiance dans la qualité et l’honnêteté
de leur travail chez le producteur. Dans le Ferlo du Sénégal, LY constata que l’utilisation des soins curatifs avait doublé
et l’achat de traitements préventifs avait augmenté de deux à quatre fois quand les producteurs étaient servis par des
auxiliaires d’élevage qui entretenaient des relations étroites avec un DMV employé par une ONG en laquelle les
populations locales avaient confiance (2000). Woods a constaté des effets identiques par rapport aux relations entre les
DMV et les quasi-professionnels au Zimbabwe (2001).
4.5. Il faut noter cependant qu’il est extrêmement important que les DMV et les para-professionnels aient besoin les uns
des autres – sans quoi leurs relations se détérioreront. Le DMV s’appuie sur les auxiliaires d’élevage et les quasiprofessionnels pour l’administration de soins de routine, accessibles et financièrement abordables aux éleveurs, pour
consolider une réputation de fiabilité auprès des populations locales et pour renvoyer au niveau supérieur les cas qui
dépassent leurs compétences. L’auxiliaire d’élevage dépend du DMV pour sa formation et son approvisionnement en
produits pharmaceutiques. Si l’auxiliaire d’élevage devait essayer de revendiquer la part des interventions pour laquelle
seul le DMV est compétent, la relation se détériorerait et la qualité née de l’existence de cette même relation serait
perdue. Au Zimbabwe, Woods a constaté que face à des clients relativement aisés, les quasi-professionnels se donnent
souvent le titre de « docteur », certainement pour accroître la demande par rapport à leurs prestations de services. Ly
(2002) rapporte que les auxiliaires d’élevage dans le Ferlo sénégalais veulent avoir avec eux des outils de diagnostic
pour lesquels ils n’ont pas été formés, et pratiquer la chirurgie. En faisant cela, ils essaieraient de tirer profit des signes
extérieurs visibles qui différentient les DMV des auxiliaires d’élevage dans l’esprit des populations, et de mettre fin aux
relations basées sur des avantages mutuels desquelles dépend un système vétérinaire qui fonctionne bien. Il est
important d’éviter de tels subterfuges de la part des auxiliaires d’élevage.
4.6. Les DMV ont besoin de contrats avec l’Etat pour assurer l’organisation du mandat sanitaire. Il n’est pas difficile
de privatiser la médecine vétérinaire curative et nous avons fortement recommandé qu’il en soit ainsi dans les pays
africains, étant donné le manque de finances publiques. Quand les épizooties sont prévalentes ou quand l’Etat arrive à
faire respecter les exigences relatives à l’immunisation, il est possible d’entretenir un marché privé de traitements
préventifs. La surveillance des maladies est un bien public, cependant, et les campagnes officielles de vaccination sont
généralement le moyen le plus efficace de préserver l’immunité des troupeaux une fois que les épizooties et les
enzooties ont été circonscrites. Là où il est possible de le faire, il est préférable de préserver le rôle de l’Etat dans la
médecine vétérinaire préventive. Cela ne doit pas vouloir dire que les agents de l’Etat doivent eux-mêmes procéder aux
vaccinations et à la surveillance. Un certain de pays européens ont eu des expériences très positives en passant un
contrat avec des praticiens privés pour ces services (Hellberg, 1990 ; Ly, 2002). Il y a de nombreux avantages à étendre
cette pratique à l’Afrique.
4.6.1. Le premier avantage est l’efficacité. Les campagnes de prophylaxie ne sont nécessaires que de manière
sporadique. Les coûts sont réduits si le personnel nécessaire est déjà déployé, s’il connaît les éleveurs et peut articuler le
travail à effectuer autour de ses autres activités. De même, la surveillance des maladies est une activité de base, mieux
réalisée en parallèle par ceux qui travaillent déjà dans la zone.
4.6.2. Le second avantage est la couverture. Quand l’Etat passe un contrat avec des praticiens privés pour mettre en
œuvre le mandat sanitaire, il incite en même temps le personnel qualifié à rester dans les régions isolées. Souvent, un
contrat de santé publique représente la différence entre une installation vétérinaire privée viable et rien du tout. Les
contrats mènent donc à une couverture vétérinaire améliorée dans le pays et pour toutes les catégories de producteurs.
Ils sont un excellent moyen d’assurer que les pauvres soient concernés (pour plus de détails sur la contractualisation,
voir Leonard, 2000).
4.6.3. Enfin, un contrat pour le mandat sanitaire renforce les liens entre les DMV, les quasi-professionnels et les
auxiliaires d’élevage. Les contrats doivent presque toujours être passés avec les DMV, puisqu’ils ont la formation pour
servir d’interface avec l’appareil de l’Etat et pour formuler des rapports de surveillance des maladies. De par la nature
de leur cabinet, il sont aussi plus susceptibles d’avoir l’équipement pour conserver la chaîne de froid et convoyer les
vaccins rapidement vers les sites où ils sont attendus. Les DMV, d’autre part, sont trop chers et trop éloignés
socialement des communautés d’éleveurs traditionnels pour fournir le meilleur travail lors des vaccinations. Il est
préférable que ce travail soit effectué par les auxiliaires d’élevage – le plus souvent sous supervision (ou au moins avec
l’appui) des quasi-professionnels. Par conséquent, les campagnes de vaccinations donnent l’occasion et les moyens de
faire travailler les trois groupes ensemble et donc de renforcer les liens nécessaires pour maintenir la meilleure qualité
possible de services vétérinaires accessibles.
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5. Conclusions
L’Etat a un rôle crucial dans la création de systèmes vétérinaires adéquats pour les éleveurs africains et dans le soutien
des interventions de prévention. Cependant, les DMV privés, les quasi-professionnels et les auxiliaires d’élevage, qui
offrent des services de médecine curative à des fins lucratives et qui assurent la prévention sous contrat avec l’Etat,
constituent de loin le meilleur système permettant d’atteindre ces objectifs - en particulier quand ils entretiennent des
rapports étroits par le biais de renvois mutuels ce cas, de la filière d’approvisionnement en produits pharmaceutiques et
de la mise en application du mandat sanitaire. Les pauvres seront servis adéquatement par un tel système. On allie
l’expérience à la théorie sur ce qui doit être fait. Nous devons poursuivre le travail ardu de la mise en œuvre.
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