69 - UNIPEF
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C O N F E R E N C E RENCONTRES DU CLUB DES PONTS ans le cadre des « Rencontres du club des Ponts », organisées par l'AIPC nous vous présentons un compte-rendu d'un débat sur l'aménagement du territoire qui s'est tenu le mardi 18 janvier 94. Ce, débat animé par Pierre-Henri Paillet et Jean Poulit, réunissait Jean FRANCOIS-PONCET ancien Ministre, Président de la Commission des Affaires Economiques du Sénat, Président du Conseil Général de Lot-et-Garonne, Gérard LARCHER, Sénateur des Yvelines, Maire de Rambouillet, Secrétaire du Bureau du Sénat, Jean-Pierre BALLIGAND, Député de l'Aisne, Conseiller Général de l'Aisne, Maire de Vervins, Michel MARCHAIS, Président Directeur Général de TAT European Airlines, Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Tours et d'Indre et Loire. D De gauche à droite : Pierre-Henri Paiiiet, Michel Marchais, Gérard Larcher, Jean-François Poncet, Jean-Pierre Bailigand et Jean Poulit. PCIVI - LE PONT — IVIARS 1994 63 C O N F E R E N C E Jean POULIT : Ce débat inaugure une série de rencontres, sous l'égide de l'AIPC, « les rencontres du club des Ponts ». L'AIPC a mis en place plusieurs cercles de réflexion sur des grands thèmes de société tels que l'aménagement du territoire ou l'environnement. Afin de prolonger et d'enrichir les débats internes, l'AIPC se tourne sur le monde politique et économique en organisant ce débat sur l'Aménagement du Territoire. Pierre-Henri PAILLET : Le débat sera organisé autour de trois thèmes : tout d'abord, pourquoi refaire de l'aménagement du territoire ? Quels en sont les objectifs ? Est-ce dû à des motivations liées à des contraintes de solidarité, d'environnement, à l'Europe ? Ensuite, si celui-ci est nécessaire, qui doit le faire, qui en a la responsabilité ? Est-ce une compétence de l'État ou bien serait-il plus efficacement traité à un niveau régional voire départemental ? Les acteurs privés n'ontils pas également un rôle à jouer ? Enfin, que faire, quelles actions mener pour atteindre les objectifs fixés ? Des actions par cibles géographiques : les villes, la campagne, la province, l'Ile-deFrance, mais aussi des actions en terme de politique technique, d'outils juridique, de moyens à utiliser. Jean POULIT : Des études d'universitaires, tels que le professeur Prud'hom de l'université de Créteil, montre que la productivité d'une agglomération croît avec sa taille. Ainsi, un actif de la région parisienne produit 17 % de plus qu'un actif de la région Lyonnaise, et la région Ile-de-France, par actif, 35 % de plus que le reste du pays. Partagez-vous ce point de vue ? Si vous l'admettez, comment l'expliquez vous ? Si la France n'avait pas accepté la civilisation urbaine aurait-elle pu être compétitive en Europe ? Jean FRANCOIS-PONCET : Le diagno Stic sur la surproductivité parisienne a été élaboré à ma connaissance par l'IAURIF, institut mis en place en Ile-de-France pour développer une thèse dont les conclusions étaient prévisibles. Cette thèse se heurte à de nombreux arguments, dont notamment une étude de la centrale des bilans de la Banque de France qui montre une légère et non parlante surproductivité des entreprises en fonction de leur taille. Le bien fondé de tels arguments est nul. Le GERl démontre que les investissements de l'État, loin d'avoir soutenu les régions fragiles, ont fait l'objet d'une surrépartition au profit de la région parisienne. Ainsi, par exemple, comment se fait-il que la région Ile-de-France soit celle qui invcsdsse le moins pour les infrastructures de transport routier ? L'Allemagne, l'un des pays les plus productifs de l'Europe, est un pays qui a placé l'aménagement du territoire parmi ses premières priorités et qui a mis en place des mécanismes dont la future loi d'orientation devrait s'inspirer. La plupart des grandes agglomérations allemandes ont une population qui diminue tant en pourcentage qu'en valeur absolue. La surproductivité éventuelle devrait être mise en parallèle avec ce que la collecfivité paie. Les entreprises seraient-elles aussi compétitives si elles payaient les 4,5 milliards de francs que l'État verse pour l'équilibre des transports collectifs parisiens, à comparer aux deux milliards du budget de l'aménagement du territoire. Il faut également mettre en parallèle les coûts nationaux issus de la dislocation du territoire et les coûts sociaux de la concentration urbaine (drogue, violence...). Pierre-Henri PAILLET : Monsieur Marchais, partagez-vous l'avis exposé par J. Poulit sur la surproductivité des grandes agglomérations ? Michel MARCHAIS : Les regards sont trop focalisés sur la région parisienne. Les chefs d'entreprises recherchent en province tout ce qui contribue à l'accroissement des richesses. La province n'est donc pas condamnée parce qu'elle est pauvre, mais PCM - LE PONT — MARS 1994 64 du fait qu'elle ne peut développer de richesses. Les richesses précédent et créent les emplois. Avant de travailler pour protéger l'emploi, comme on s'y engage, développons les richesses qui créeront les emplois. Il faut également évaluer ce que l'on peut faire dans chaque ville de province, en prolongeant la démarche des métropoles d'équilibre de Delouvrier, en étendant la recherche de l'équilibre à tout ce qui peut créer des richesses. I Pierre-Henri PAILLET : Quand on pense aménagement du territoire, on pense d'une part à la compétitivité et d'autre part à la solidarité. Ces objectifs ne sont-ils pas inconciliables ? Gérard LARCHER : Certaines études I présentent l'Ile-de-France comme la mère nourricière de la France, d'autres comme la « sangsue » de la France. Elle est ni l'une ni l'autre, mais ce qui importe est de reconstruire une véritable solidarité nationale. L'objectif de compétitivité doit être obtenu • partout dans le territoire. Il doit exister cependant une équivalence de traitement permettant à tous les citoyens d'accéder au développement économique et à un épanouissement collectif et personnel. L'aménagement du territoire est fait pour les hommes avant d'être fait pour des raisons économiques. Il existe certes une surproductivité dans des régions bien organisées et généralement urbanisées. Personne n'a quantifié jusqu'à présent les coûts sociaux tels que la délinquance, la casse issus de la métropolisation. Il faut plutôt redéfinir une complémentarité du territoire, un rééquilibrage, ce qui constitue le schéma inverse de celui qui était propasé dans le schéma directeur d'Ile-de-France, il y a de cela trois ans, considérant la croissance pari, sienne comme inexorable, comme une fatalité et pour l'Ile-de-France et pour la France. I I C O N I I F E P E N C E Pierre-Henri PAILLET : L'aménagement du territoire doit-il privilégier l'homme ou le développement économique ? Jean-Pierre BALLIGAND : L'air du temps consiste à dire que l'économie n'est pas le facteur central et que l'urbain n'est pas un phénomène dominant. L'aménagement du territoire ne se réduit pas à des pétitions pour une économie au service des hommes, mais il doit avoir l'ambition, s'il ne veut pas décevoir, de canaliser les flux économiques et de les orienter à la marge. Les technologies modernes devraient permettre la diffusion des activités sur tout le territoire, mais on ne lutte pas contre les flux économiques et la concentradon économique. On ne lutte pas contre le phénomène urbain dominant. Les jeunes en formation quittent les campagnes et généralement n'y retournent pas. Comment remettre en compétitivité les territoires ruraux ? Les voies de communication routières ne constituent pas l'unique réponse et l'utilisation des technologies modernes de télécommunications ou la réduction des charges patronales doivent permettre de stabiliser les entreprises de main d'œuvre à faible valeur ajoutée qui actuellement quittent les campagnes. Le rural doit avoir un environnement. Il faut donc recréer de l'urbain dans le rural en évitant la surdétermination politique et une médiatisation excessive de l'image urbaine. Michel ROUSSELOT : Ne mélange-t-on pas deux concepts : un concept de développement économique régional, local voire rural en cherchant où se trouvent les moteurs du développement et l'aménagement du territoire sous un .sens plus social, visant à remédier aux inégalités, à la désertification qui ne peut résulter que d'une action redistributive menée au niveau national voire européen. Ces deux concepts ne doivent pas être mélangés. Jean FRANCOIS-PONCET : Séparer le développement du rééquilibrage reflète une conception très française qui ne serre pas la réalité. En Allemagne, le land de Bavière est celui qui se développe le plus vite. Or depuis 15 ans le PIB des zones rurales croît plus rapidement que celui des villes. Je refuse donc d'opposer développement économique et aménagement du territoire. On accepte la fatalité, on cède à l'obsession urbaine, comme les universitaires qui lient la compétitivité des universités à leur taille, alors qu'aux États-Unis, il existe des universités n'ayant que 5 000 étudiants, mon- PCM - LE PONT — MARS 1994 65 dialement connues, car elles ont choisi de se spécialiser. Le sentiment général considère que le progrès est à la ville et que l'espace rural est un chef d'œuvre en péril qui doit être protégé. Tout ceci résulte d'une conception très française et doit être remis en cause. Les derniers recensements de l'agglomération parisienne présentent l'augmentation d'une population jusque là contenue. Cela résulte d'une nouvelle politique avec laquelle une véritable rupture s'impose. Gérard LARCHER : Il faut réfléchir au résultat de dix ans de décentralisation. Si l'Etat ne s'engage pas à lutter contre les inégalités le salut ne viendra pas de la superposition des égoïsmes naturels des acteurs locaux. Le parlement a un rôle historique de péréquation qui fonde l'unité nationale. La décentralisation n'est pas remise en cause, mais une redéfinition des compétences de l'Etat s'impose pour éviter que la France intègre l'Europe par morceaux, par le biais d'accord interrégionaux. Plutôt qu'une inflexion du développement économique nous en recherchons la maîtrise. Sans cette volonté forte, le repli vers des égoïsmes est inéluctable, et le niveau de l'Etat est le bon pour appliquer cette volonté. Jean-Pierre BALLIGAND : Le développement de l'espace rural requiert des pôles d'appuis urbain mais pour éclater l'urbain, les limites administratives excessivement réduites conjuguées à la superposition des niveaux des collectivités locales constituent un obstacle majeur. Ainsi la communauté u r b a i n e de Vervins c o m p t e 28 000 habitants pour 68 communes ! Jean FRANCOIS-PONCET : Personne ne conteste la nécessité des villes pour le développement rural. Pierre-Henri PAILLET : Au cours de ce débat sont apparus les différents niveaux de responsabilité que sont l'État, les Départements, les Communes auxquels il faut ajouter les Régions. De qui attendez-vous la création d'un dynamisme économique et de libertés supplémentaires pour entreprendre et également le maintien d'un tissu de base qui leur permettent de s'exprimer ? Michel MARCHAIS : Laissez-faire les régions, donnez leur l'égalité des chances, sans leur apporter la charité. Pour lutter contre la désertification des campagnes, il faut éviter les artifices, il faut déplacer les sièges sociaux, non par décision politique \ \ \ \ \ T ^ T ^ I -1 I C O N F E R E N C E mais par des incitations économiques. Si l'exemple Toulousain est politique, l'exemple de Nice prouve que de tels mouvements sont possibles. Jean POULIT : Nous abordons le deuxième thème du débat, concernant les niveaux de responsabilité en terme d'aménagement du territoire. Sur le plan technique, deux niveaux ont été dégagés : d'une part les bassins de vie correspondant à l'espace de vie quotidienne. Ces espaces se sont élargis avec l'évolution des transports et coïncident désormais avec l'échelon de l'arrondissement préfectoral d'autre part l'espace national qui détermine les courants d'échanges entre les bassins de vie. L'échelon communal n'est pas adapté aux bassins de vie qui représente près de 100 communes. Peut-on créer des structures politiques à l'échelle de ces bassins de vie ? Par quelles voies ? Pour organiser les complémentarités entre les bassins de vie, l'action doit-elle reposer sur l'Etat, la Région, le Département ? Jean FRANCOIS-PONCET : La réussite demande de l'audace sans sombrer dans l'utopie. Réduire le nombre de communes, comme en Suède ou en Allemagne, est idéalement nécessaire, mais politiquement infaisable. Cet obstacle peut être contourné en clarifiant les compétences et en désignant pour chaque domaine un niveau chef de file. Le couple département-communes constitue le chef de file naturel de l'aménagement de l'espace rural, alors que l'État est le chef de file naturel de la stratégie avec les instruments que sont les infrastructures financières via la péréquation, les infrastructures de communication au sens large et les infrastructures intellectuelles. Les entreprises vont au marché ou à la matière grises. Le schéma Universités 2000 doit être révisé en intégrant un nouveau modèle d'Universités plus réduites et spécialisées. Des actions spécifiques doivent ensuite être menées sur les territoires à problèmes que sont la région parisienne, l'espace rural et surtout les banlieues. L'État doit adapter le cadre réglementaire et fiscal, désenclaver grâce à de nouvelles infrastructures de communication, assurer une meilleure péréquation des richesses, pour permettre le développement des entreprises et notamment des petites entreprises. Pourquoi ne pas créer une école des Mines spécialisée dans l'ingénierie des petits projets ? Il est indispensable de revenir sur le prin- cipe sacro-saint des comptages qui accroît la concentration et d'introduire des axes ayant pour seul objet le désenclavement, en améliorant le système de péréquation. Pourquoi ne pas utiliser les péages routiers pour financer des LGV ? Évitons les cloisons étanches, développons la concertation, les procédures de contractualisation, les financements croisés, en clarifiant et simplifiant, et surtout, en identifiant des chefs de file. Ainsi une véritable politique d'aménagement du territoire pourra être engagée, à la fois nationale, avec un État qui retrouve son rôle de stratège et de coordonnateur des actions régionales, et décentralisée. seule logique libérale et monétariste, et montrer une volonté politique forte, financée par un système de péréquation autoroutière. C'est là le rôle de la caisse nationale des autoroutes qui devrait plutôi faire des placements en aménagement di territoire que de faire des dividendes. Bernard DE KORSAK ; L'aménagement du territoire repose sur trois leviers. Les deux premiers, la péréquation fiscale et les infrastructures de communication doivent demeurer centralisés pour les grands axes stratégiques. Préconiseriez-vous une décentralisation de l'enseignement supérieur pour assurer une répartition de la matière grise ? Jean FRANCOIS-PONCET : L'État, effecdvement doit s'occuper des grands axes stratégiques en prenant en compte le critère de désenclavement et la nécessité d'intégrer notre territoire à l'Europe. Les potentiels de développement se situent désormais plus dans le Sud de l'Europe que vers l'Est où le désordre russe ne sera pas sans conséquences et notre programmation du territoire doit l'intégrer. En ce qui concerne la péréquation, nous souhaiterions nous inspirer du modèle allemand. Dans la constitution politique existe une constitution financière qui prévoit qu'entre les lander les plus riches et les lander les plus pauvres, l'écart de ressources par rapport à la moyenne ne peut excéder 5 %. Lorsque l'écart est inférieur à 2 % la péréquation est nulle, elle est partielle entre 2 et 5 % et totale au-delà. Pourquoi ne pas inscrire un tel système, même moins égalitaire, dans la future loi d'orientation ? Claude MARTINAND : Tant que les critères de rentabilité seront les seuls retenus et qu'aucun critère d'équité ne sera établi, cette question ne pourra être clairement étudiée. Les accords du GATT et le traité de Rome, avec le risque de dérégulation et donc de dépéréquation du transport aérien intérieur, ne constituent-ils pas de graves menaces pour l'aménagement du territoire ? Gérard LARCHER : Il faut refuser la PCM - LE PONT — MARS 1994 66 Plus de place dans l'Amphi, mais retrar( Michel MARCHAIS : L'Etat n'apporte aucun support sur les petites lignes, qui sont exclusivement soutenues par les conseils généraux ou régionaux. Si la péréquation existe entre Paris-Nantes et Paris-Toulouse, via Air-Inter, elle disparaît entre Pau-Toulouse et Paris-Aurillac. Pourquoi une péréquation ? Pour protéger qui ? Le protectionnisme protège les richesses acquises mais n'en développe pas ! II faut au contraire laisser la concurrence se faire. * La péréquation n'existe pas. Il suffit d'examiner, au niveau communal, la guerre des prix entre communes voisines pour accueillir et pomper ensuite les entreprises via la taxe professionnelle qui représente entre 30 et 35 % du budget des communes. La péréquation qui n'existe que dans quelques ^ grands groupes ne représente pas une so-1 lution. L'État doit plutôt réformer la fiscalité qui pèse sur les entreprises notamment la taxe professionnelle, et laisser faire la concurrence pour créer des richesses. i Jean-Pierre BALLIGAND : La loi du 6 février 92 répond à votre question. La taxe C O N F E R E N C E professionnelle est établie d'une manière uniforme sur des zones géographiques choisies et répartie uniformément sur l'ensemble des communes, ce qui devrait supprimer dans la plupart des cas, les luttes intercommunales. Tout le rural n'est pas en crise. ces dernières demeurant chefs de file pour l'élaboration des plans régionaux. Pourquoi ne pas créer une assemblée des 22 régions qui participerait à la définition de la stratégie et une conférence sur l'aménagement du territoire à l'échelle de la région des départements. Chacun connaît sa mission principale, mais chacun participe à l'exécufion de la mission des autres, pour garantir une convergence des politiques, l'État étant le chef d'orchestre et construisant sa stratégie dans un contexte européen. Jean POULIT : Parmi les outils, les outils financiers ont déjà été analysés. Pourrait-on évoquer les directives territoriales d'Aménagement ? Doivent-elles être définies par l'État et relayées localement, ou être définies localement en re.stant compatibles avec les schémas nationaux ? Pourrait-on également évoquer les outils opérationnels, industriels et commerciaux, tels que les villes nouvelles ? Serait-ce transposable à des sites d'intérêt touristique fort ? I assurée dans le hall. Il existe du rural qui se porte bien, certes, mais un rural qui se transforme en périurbain sous l'influence de la dilatation urbaine. Roland BONNEPART : L'État a un rôle de stratège et les collectivités d'aménageurs. Quels mécanismes doit-on mettre en place pour dégager des chefs de file parmi les nombreux niveaux de collectivités locales ? Jean FRANCOIS-PONCET : La loi d'orientation sur l'aménagement du territoire devrait définir ces chefs de file. En ce qui concerne l'espace rural, le chef de file pourrait être le Conseil Général qui repréI sente un substitut à l'intercommunalité. L'État doit réfréner ses tendances interventionnistes. La création des sous-préfets aménageurs est critiquable, elle risque d'introduire la guerre civile dans les départements. L'Etat doit, dans ce domaine, se borner à fixer les cadres. Une concertafion et même un processus de codécision doit s'établir entre départements et régions. Jean-Pierre BALLIGAND : En ce qui concerne les SDAU, la procédure de codécision permettrait d'éviter un certain nombre d'effets pervers de la décentralisation. L'État doit conserver sa fonction normative. Mais le rôle de la région doit-il être discuté ? Le schéma idéal, selon moi, s'articulerait autour de l'intercommunalité, les régions et l'Europe. Seulement, dans la crise d'appartenance politique actuelle, il faut éviter de créer des structures territoriales où le sentiment d'identité aurait disparu et le département constitue une entité à la fois proche des gens et bien identifiée, sauf peut-être en région parisienne. Il faudra absolument sortir de la situadon nébuleuse actuelle. Ou l'État fait les schémas directeurs et utihse les collectivités pour les faire appliquer, ou les collectivités les prennent en charge et dans ce cas lesquelles ? Le choix se présente donc entre la région d'une part, ou le couple État-département d'autre part. Jean FRANCOIS-PONCET : Je suis un régionaliste convaincu, et si des fusions de régions sont nécessaires, le faire dès à présent conduirait a détourner et politiser inutilement le débat. Avant tout il faut se débarrasser de l'idée d'un antagonisme entre rationalité économique et aménagement du territoire. Les nouvelles technologies notamment en matière de télécommunication doivent induire de nouvelles structures. PCM - LE PONT — MARS 1994 67 La croissance urbaine a des limites dont le tiers monde présente chaque jour les limites. Les grandes agglomérations doivent désormais jouer la carte de la qualité et non celle de la quantité. Paris représente un intérêt national, mais son développement passe par l'amélioration de son image, par la réduction de la délinquance notamment, et non par l'augmentation de sa population. Puisse l'analyse des exemples de pays développés tels que l'Allemagne ou les États-Unis, nous débarrasser d'un des grands maux français, qui est, avec la centralisation, l'obsession urbaine. Gérard LARCHER : A propos de l'Ilede-France, nous proposons que le SDAU retourne à la compétence de la région avec approbation de l'État, et non l'inverse comme actuellement, bien que Paris soit la capitale. Nous devons substituer à une stratégie d'affrontements une stratégie de codécision à l'image de ce qui se passe en Allemagne. Nous proposons également la tenue d'une conférence d'aménagement du bassin parisien permettant de valoriser le grand bassin parisien, avec un risque d'élargissement d'un phénomène qui appauvrisse les autres. Nous proposons, en outre, le rétablissement de l'autorisation administrative préa- 1 \ \ [ \ C O N F E R lable pour un certain nombre de constructions en Ile-de-France. L'Ile-de-France en effet dispose de 10 % de bureaux en trop, ce qui constitue environ 5 ans de stock. Nous proposons également le transfert sur trois contrats de plan de la responsabilité du transport et de son surcoût, soit 4,6 milliards de francs par an à la Région, à raison de 40 % sur le premier, 40 % sur le deuxième et 20 % sur le troisième. Enfin nous proposons de conforter la place de Paris dans l'accueil des quartiers généraux d'entreprises. Nous en avons accueillis quatre fois moins que nos voisins allemands ou anglais et seul Paris possède l'attractivité nécessaire. La péréquation demeure indispensable, notamment dans le domaine des télécommunications. Une politique ultralibérale engendre des fractures dans la société. Une solidarité est donc nécessaire. L'Etat doit assurer l'unité de la nation et son intégration à l'Europe. La loi d'orientation doit représenter la colonne vertébrale sur laquelle se grefferont l'ensemble des actions en matière d'aménagement du territoire. Je conclurai sur le cumul des mandats. Il apprend à partager les responsabilités et à éviter l'émergence des féodalités qui est un risque de la décentralisation que l'Etat doit empêcher, en évitant le repli sur soi- E N C E même et en assurant la cohésion nationale et l'intégration européenne. Michel MARCHAIS : Je partage la nécessité d'un circuit entre les régions et l'Europe, mais cela demande de communiquer vite, ce qui résulte d'une véritable volonté de décider ensemble, comme dans les négociations dans les landen Le libéralisme créera des richesses, mais ce n'est pas par une péréquation des moyens financiers que l'on traitera les problèmes des communes. L'incapacité à attirer sur notre sol des entreprises comme Apple Europe montre bien que quelque chose nous manque. Jean-Pierre BALLIGAND : La France souffre d'un jacobinisme excessif. Les métropoles d'équilibre programmées voilà bientôt 40 ans ne sont, hormis Lyon, toujours pas réalisées. Contrairement aux Allemands qui ont défini des vocations et des spécialisations à leurs villes, les Français souffrent de l'hypertrophie de la capitale et en outre d'un incroyable mimétisme des villes entre elles, sur la base du modèle parisien. Par mimétisme, nous avons réinventé localement le verticalisme administratif au lieu de mettre en place des structures transversales. PCM - LE PONT — MARS 1994 68 L'aménagement du territoire a une vocation interministérielle. Le défi qui nous est lancé n'est pas perdu, il suffit de savoir sur quoi nous allons fonder le développement, et je suis persuadé qu'il passera par la mise en place d'une dizaine de métropoles d'équilibre. Jean POULIT : Je vous remercie tous pour ce débat enrichissant. Deux tendances ressortent du débat ; l'une plus agressive visant a maîtriser les flux économiques, l'autre plus prudente tendant à accompagner les tlux. Si cette volonté politique forte existe, le succès sera d'autant plus sûr que les obstacles à bousculer auront été identifiés, i Nous pouvons, nous techniciens, travailler avec vous pour les identifier, évaluer le poids de l'économique, des difficultés des zones qui se dépeuplent, sachant que la politique aura malgré tout, le dernier mot. Mais nous sommes à votre service pour travailler avec vous sur ce sujet difficile de l'aménagement du territoire. •' NDLR : Un grand merci aux Ingénieurs-Élèves 93 qui ont rédigé ce compte-rendu 1 V I D E A S S O C T n r 1 A T I 1 I O N LES RENCONTRES POUR L'EMPLOI Les 15 et 16 avril prochains, à l'initiative du Ministère du Travail, de l'Emploi et de la Formation Professionnelle, se tiendront les Rencontres pour l'emploi dans 26 villes de France. Un objectif majeur : rapprocher l'offre et la d e m a n d e d'emploi - de rencontrer des candidats pré-sélectionnés par l'ANPE et correspondant aux profils recher- ' chés, à l'occasion de rendez-vous programmés. - de présenter les profils des postes à pourvoir et se constituer un vivier de candidatures ; - de présenter les métiers et filières de formation : - de s'informer sur les mesures gouvernementales d'aides à l'emploi ; - de valoriser l'image de l'entreprise auprès de ses partenaires et des visiteurs Les Rencontres pour l'emploi première opération de cette envergure au pian national ont pour objet de confronter, en réel l'offre et la demande d'emploi et mettre en relation directe les citoyens et les acteurs écomiques. Pourquoi participer aux Rencontres pour l'emploi ? Les Rencontfrtes pour l'emploi mettent à la disposition des entreprises un ensemble de services destinés à faciliter et accélérer leur procédure de recrutement. Elles leur permettront : - d'avoir des contacts directs avec des demandeurs d'emploi de toute qualification (jusqu'aux plus hautes), concentrés dans le temps, sur un même lieu à un coût modique. A l'Instigation du Ministère du Travail, de l'emploi et de la Formation Professionnelle, tous les acteurs économiques se mobilisent en faveur de l'emploi. Participer aux Rencontres, c'est participer à une initiative dynamique et constructive pour l'emploi. Ministère du Travail de l'Emploi et de la Formation Professionnelle Jeanne MAUD-VOYENNE Tél. : 40 56 68 51 Francette AUBERT Tél. :40 56 68 16 PCM — LE PONT — MARS 1994 70 C O N F E RE N C E CONFERENCE DU GÉNÉRAL MORILLON Vendredi 4 février 1994 Vendredi 4 février 1994, l'AAENPC et le BDE accueillaient à l'École le Général Morillon. Il n'est pas besoin de présenter cet illustre ambassadeur de rONU ; c'est ainsi que son discours s'est rapidement ouvert en un débat fort animé dont voici les points principaux : T^rraBWKar Le Général Morillon a tout d'abord exposé l'évolution des stratégies de maintien de paix de l'ONU durant les 40 dernières années. Ainsi, dans un souci de sécurité pour les soldats, sommes nous passés de la stratégie « un sifflet, pas de bâton » à celle d'une protection passive (utilisation d'engins blindés face aux mines) puis d'une protection active (utilisation de chars face aux tireurs d'élite). Mais, face à l'artillerie, aucune rétorsion n'est actuellement autorisée ? Et l'origine du débat est là. Dans le cadre d'actions humanityaires, l'emploi militaire doit mettre fin à la menace. Faut-il autoriser l'appui rapproché aérien ? Le Général Morillon a également sensibilisé son auditoire au problème d'opinion publique, de mauvaise information, d'illusion d'une guerre propre. <' La guerre ne sera jamais propre ». D'où l'utilité de clarifier les objectifs de l'ONU : Metter fin à la politique de purification ethnique, poser des garde-fous en prononçant les Droits et Devoirs des Minorités. De nombreuses questions ont permis au Général Morillon de nous faire partager certaines de ses expériences de terrain et d'aboutir à cette conclusion : « Le devoir d'assistance à personne en danger persiste. La présence des casques bleus se justifie, elle a sauvé des milliers de vies en permettant l'aide tiumanitaire. Dans les villes, la survie dépend de cette aide, dans les campagnes, on survivra toujours. » Pour le BDE V i n c e n t PORFIRIO PC M — LE PONT — MARS 1994 71 ^^^^^^^BKÊ. "^^^SsàmSSaSSSSSSM j^^^^^^^t ff ^ ^ H ^HT ^jr^mBä iÉf • H ;j "Avec la nouvelle station ' Il • " ^ 1 d'épuration, l'eau estplus claire." - "Alors, je vais pêcher plein de Crédit local de France, le spécialiste du financement Un métier, un seul Le Crédit local de France est le principal partenaire financier des communes et de leurs groupements, des départements et des régions. Il réalise près de 45 % des crédits aux collectivités locales et fonde son p a r t e n a r i a t s u r la p e r m a n e n c e et le long terme. Ingénierie 1 financière Pour chaque collectivité, quelle que soit sa taille, le C r é d i t local d e F r a n c e développe de n o u v e a u x p r o d u i t s et propose des financements sur mesure adaptés à la diversité des projets locaux (écoles, lycées, é q u i p e m e n t s sportifs, ponts, tramways, espaces verts...). truites!" local Des spécialistes dans chaque région Cent soixante mille actionnaires individuels Les vingt-deux directions régionales du Crédit local de France connaissent bien les enjeux locaux. Plus de trois cents conseillers et experts financiers sont ainsi présents sur le terrain et mettent leur savoir-faire au service des décideurs locaux. Ceux-ci ont choisi d'accompagner de p l u s p r è s l ' e n t r e p r i s e d a n s son développement. Leur participation, aux côtés de grands investisseurs français et internationaux, témoigne de leur intérêt pour l'amélioration du cadre de vie. Pôle de connaissance des finances locales Le Crédit local de France est un pôle d'information, d'analyse et de prospective sur les finances locales. Sa connaissance approfondie du secteur lui permet de trouver, avec les collectivités locales, les solutions qui garantissent leur avenir. 1) I T L O G A L d. F R A N C E Le financier du cadre de vie